Que feront-ils après le 20 janvier ? Malia et Sasha prendront leur envol, Barack pourrait écrire ses Mémoires, et Michelle se lancer en politique. Une chose est sûre : ils n’ont pas fini de nous étonner.
La vie devant lui… Le 20 janvier, Barack Obama, qui aura 55 ans, ne sera plus président des États-Unis. Et si cette perspective l’a longtemps enchanté – il avait juré de prendre de longues vacances –, c’était parce qu’il pensait confier les clés de la Maison-Blanche à Hillary Clinton. L’élection de Trump a évidemment changé beaucoup de choses.
Son emploi du temps sera, en tout cas, bien chargé. Obama, qui s’est toujours débrouillé pour dîner le plus souvent possible avec Michelle et leurs deux filles durant ses huit années de présidence, retrouvera à temps plein le rôle qu’il affectionne tant, celui de mari et de père.
Livre à succès
Si l’aînée des filles Obama, Malia (18 ans), a quitté le nid familial – elle a pris une année sabbatique avant son entrée à Harvard en 2017 –, Sasha (15 ans) n’achèvera qu’en 2018 sa scolarité au lycée, raison pour laquelle les Obama vont rester à Washington encore au moins deux ans. Ils vont louer – pour 22 000 dollars par mois – une maison de 760 m2 dotée de neuf chambres dans le quartier cossu de Kalorama, à un jet de pierre de la Maison-Blanche (la demeure est évaluée à 6 millions de dollars).
Là, Obama pourra s’atteler à un exercice obligé pour un ancien président des États-Unis : la rédaction de ses Mémoires. Il est déjà conscient des difficultés du genre : « J’ai remarqué que les Mémoires [de mes prédécesseurs] sont souvent truffés de “et il est arrivé ceci, et il est arrivé cela…” », expliquait-il récemment dans le New Yorker.
Ce seront, et de loin, les Mémoires les plus lucratifs de l’Histoire
À la différence de Jimmy Carter, Obama n’a jamais tenu de journal de bord de ses années de pouvoir. Mais il sait déjà qu’il ne pourra pas s’y montrer aussi libre que dans son premier livre, Les Rêves de mon père, qui fut un coup de maître. « Quand vous avez rencontré des personnes dans un cadre qu’elles pensaient privé et que, soudainement, vous vendez la mèche, c’est comme si vous révéliez quelque chose de désobligeant au sujet d’une ancienne petite amie », a-t‑il avoué.
Une chose est sûre, les à-valoir atteindront plusieurs millions de dollars. Interrogé à ce sujet par le New York Times, un agent littéraire, Raphael Sagalyn, estime que « ce seront, et de loin, les Mémoires les plus lucratifs de l’Histoire », et avance le chiffre de 30 millions de dollars (près de 28 millions d’euros) pour deux ou trois livres, même si les éditeurs de la place situent plutôt la somme autour des 10 millions. Le succès du livre est en tout cas quasi assuré.
À titre de comparaison, George W. Bush a vendu 2 millions d’exemplaires de son Decision Points, et Bill Clinton, 1,4 million de Ma vie. Obama a également pour lui d’être déjà un auteur à succès. Il a ainsi vendu plus de 4 millions d’exemplaires de ses ouvrages, qui lui auraient rapporté plus de 10 millions de dollars. Si l’on y ajoute les à-valoir du livre que Michelle Obama ne manquera pas d’écrire (Hillary Clinton avait touché 4 millions de dollars pour Living History, qui relatait son expérience de First Lady), les Obama auront largement les moyens de payer le loyer de leur maison de Washington et les études de leurs filles.
Ils pourront même s’acheter une maison à Martha’s Vineyard, cette enclave ultrachic du Massachusetts dans laquelle ils aiment passer leurs vacances d’été. De quoi aussi éviter, après avoir remis les clés d’Air Force 1, d’emprunter les avions de ligne. Le président a en effet horreur de se déchausser pour passer les contrôles de sécurité…
Indissociable de la sphère publique américaine et mondiale
Si Obama a multiplié les déclarations plus ou moins fantaisistes sur son avenir après la Maison-Blanche – il a notamment déclaré vouloir posséder une équipe de basket jouant en NBA et se lancer dans la création d’entreprise –, l’écriture tiendra une grande place dans sa vie. Il s’occupera également de sa bibliothèque présidentielle, dont il a décidé qu’elle sera à Chicago, dans le quartier de Jackson Park, dans le sud de la ville.
Obama avait longtemps hésité entre Hawaii, où il est né, et New York, où il a étudié, pour finalement choisir la ville dans laquelle il a bâti sa carrière politique. Cette bibliothèque, qui devrait ouvrir ses portes en 2020, coûtera quelque 500 millions de dollars. Elle accueillera les archives de la présidence, ainsi qu’un musée.
Obama ne renoncera pas pour autant à un rôle dans le débat public. « Avec Michelle, on a envie de créer des plateformes [d’échange] pour aider la prochaine génération de dirigeants à percer, en les formant, en leur fournissant des réseaux et en les encourageant. Nous voulons faire émerger la future Michelle ou le futur Barack Obama, qui sont déjà là mais ne savent pas comment faire vivre leurs idéaux », a-t‑il déclaré.
Obama pourrait aussi déroger à la tradition qui veut qu’un ancien président s’abstienne de critiquer son successeur. Par exemple, dénoncer les grands coups de canif que Donald Trump s’apprête à donner à son héritage, à commencer par le système de santé Obamacare, que le républicain a promis de détricoter. S’il fait tout son possible pour que la transition se déroule en douceur, Obama a néanmoins commencé à faire entendre, à mots couverts, une voix critique. Il a ainsi promis de prendre la parole si des « valeurs fondamentales » étaient attaquées et exhorté Trump à envoyer des signes d’apaisement aux femmes et aux minorités.
Alors que ce dernier a nommé conseiller à la sécurité nationale le général Michael Flynn, qui pense que les États-Unis sont en guerre avec l’islam – « la peur des musulmans est rationnelle », a twitté l’intéressé –, Obama a mis en garde contre de telles positions. « Si nous agissons comme si nous étions en guerre avec l’islam, non seulement nous perdrons encore davantage de compatriotes dans des attaques terroristes, mais nous sacrifierons les principes que nous sommes censés défendre », a-t‑il averti le 6 décembre à Tampa.
Et Michelle dans tout ça ? Au-delà de la victoire de Donald Trump, qu’elle a vécue comme une catastrophe, la First Lady a marqué les esprits en jouant un rôle de premier plan dans la campagne de Hillary Clinton. Certaines de ses déclarations sont d’ores et déjà passées à la postérité.
« Quand ils s’enfoncent, on s’élève », avait-elle tonné, lors de la convention démocrate de Philadelphie, à propos de la campagne de caniveau du candidat Trump. Michelle a si bien réussi à enflammer les électeurs que les appels se sont multipliés pour qu’elle se lance en politique. À 52 ans, « Flotus » (l’acronyme de « First Lady of the United States ») n’a jamais été aussi populaire.
À la Maison-Blanche, elle a réalisé un parcours sans faute, conquérant les Américains par sa simplicité et son dynamisme. « Si je briguais un troisième mandat, ma femme demanderait le divorce », avait blagué Barack lors d’une émission de télévision. Et s’il se trompait ? Longtemps réticente à haranguer les foules, Michelle n’a pas hésité à passer à l’action pour barrer la route à Trump. Et elle y a pris goût. « Elle a gagné en confiance, a déclaré Melissa Winter, sa chef de cabinet adjointe. Je crois qu’elle a plus apprécié cette expérience qu’elle ne l’aurait cru. »
Pourtant, selon Valerie Jarrett, une intime du couple, Michelle n’entrera pas en politique. « Il y a peu de choses dont je suis aussi sûre », a-t‑elle confié. À moins que, si la présidence Trump se révèle désastreuse, « Flotus » ne finisse par changer d’avis…
« Si je briguais un troisième mandat, ma femme demanderait le divorce », avait-il plaisanté.
Jean-Eric Boulin