Covid-19 – Des Maliens abandonnés à leur sort au Sénégal

0

Ils sont nombreux des Maliens pris au piège de la fermeture des frontières à cause de la pandémie du Covid-19 au Sénégal. Dans cette lettre parvenue ce mardi à IGFM, M. Charles Dembélé, membre de l’Association des Maliens vivant au Sénégal, lance un appel aux autorités Maliennes, pour qu’elles viennent en aide à leurs compatriotes bloqués au Sénégal.

Tandis que la communauté scientifique est à pied d’œuvre pour maitriser la pandémie afin de sauver des vies,  la crise sanitaire mondiale ne finit pas de faire des victimes notamment dans les couches les plus vulnérables avec son corollaire sur le plan social à savoir la dislocation de la cellule familiale.

Cela touche bon nombre de nos compatriotes qui sont de grands voyageurs dans le cadre des échanges commerciaux avec les pays de la sous région.

De ce fait, il ressort que des commerçants, des commerçantes et des éleveurs Maliens en majorité, venus à Dakar pour vendre respectivement leurs marchandises et leur bétail ne peuvent plus sortir du Sénégal en raison de la fermeture de leur frontière commune.

Des soutiens de familles et des personnes âgées ont dû passer le mois béni de ramadan et la fête d’Aid El-Fitr loin des leurs. Pour qui connait l’importance du mois béni ramadan dans notre société majoritairement musulmane (mois de privation ; de prière, de communion et de partage) cette situation est moralement affligeante pour ces victimes.

Pire ; en deux ou trois mois pour certains, ils ont dépensé en hébergement et en restauration tout l’agent qu’ils étaient venus chercher pour préparer la fêtes au pays ; dans le but d’acheter des habits ; des chaussures neufs et diverses denrées alimentaires pour leurs enfants comme il est de coutume.

Dans cette recherche effrénée du bonheur familial, certains ont été délogés de leur chambre d’hôtel ou de leur appartenant faute de moyens  pour honorer le loyer.

C’est alors, dans un profond désarroi et sous le feu de la cherté de la vie dans le pays de la Téranga principalement dans  les villes de Dakar ; Thiès, Mbour  et Kaolack, ils n’avaient comme seule solution que de se rapprocher de l’ambassade du Mali au  Sénégal.

Cette dernière en retour s’est contentée de leur expliquer qu’elle ne pourra que déclencher les procédures administratives afin que le gouvernement prenne des mesures pour leur rapatriement mais en insistant comme d’habitude et à chaque fois que les maliens se trouvent en difficulté ; ne pas avoir de budget alloué par son gouvernement  pour les cas sociaux.

Quant au Conseil Base des Maliens de l’Extérieur du Sénégal ; malgré son caractère d’association d’utilité publique que lui a conféré le gouvernement depuis plusieurs années ; faitière des associations constituées par les ressortissants, il résonne le même son de désespoir et de capitulation, à savoir, selon les informations, lui non plus, n’est pas dans une situation financière à hauteur de souhait pour pouvoir s’auto-saisir de ce dossier dans le cadre d’une assistance fusse-t-elle partielle.

Cette situation des Maliens bloqués au Sénégal du fait de la pandémie du Coronavirus mérite à plus d’un titre une attention particulière des autorités des deux pays.

En effet près de mille cinq cent ressortissants maliens selon ce recensement de l’ambassade du Mali au Sénégal en vue d’un rapatriement ; sont dans une situation de précarité absolue après la fermeture des frontières terrestres et aériennes, sans soutien moral ; sans aide sans assistance sociale  et financière ; encore moins un brin d’espoir de pouvoir rejoindre leur famille dans les prochains jours.

Les Maliens sont-ils en train de devenir des citoyens de second rang, laissés pour compte dans la sous-région que personne ne respecte, contrairement aux soudanais dans le passé ?

Les autres pays en collaboration avec le gouvernement sénégalais ont pu rapatrier leurs ressortissants en un laps de temps avec succès et sans problèmes majeurs.

S’agissant du cas du Mali, suite à un entretien à l’ambassade du Mali avec les conseillers et un groupe de femmes commerçantes en majorité ; qui souhaitaient que l’ambassade leur trouve des solutions pour passer la fête au Mali auprès de leurs maris et leurs enfants ; en marge de cette rencontre nous avions pris connaissance de plusieurs tentatives et démarches initiées par notre ambassade auprès des autorités Maliennes et Sénégalaises qui sont malheureusement restées sans suite à ce jour.

Par contre nous avions appris également à travers la presse que notre pays le Mali a pu rapatrier certains de nos ressortissants d’autres pays telle que la Tunisie.

Raison de se demander ce qui bloque le rapatriement des Maliens du Sénégal depuis le mois de mars.

Y’auraient-ils des agents dans l’administration malienne qui ne font pas leurs jobs?

En tout état de cause, le triste constat est que nous échouons là ou d’autres pays ont tiré leur épingle du jeu au Sénégal en rapatriant leurs ressortissants sans coup férir.

Nous avons des hauts cadres dans nos ministères et affectés dans nos corps de missions diplomatiques ; mais sont-ils conscients du sens des missions qui leur sont confiées ? Sont-ils conscients que les défaillances sur le plan diplomatique se paie cash en terme d’image encore plus qu’écorchée de notre pays?

Il ne suffit d’occuper un poste pour sa propre subsistance ou son propre bien-être; mais  il faut aussi satisfaire les besoins des autres citoyens ; usagers des services de l’Etat de façon efficience, au bon moment et avec impartialité.

Aujourd’hui mon intime conviction est que le rapatriement du Sénégal vers le Mali n’est pas un travail titanesque hors portée de notre administration.

Il suffirait que l’une de nos hautes autorités rentre en contact avec son homologue sénégalais. Une fois le cadrage diplomatique effectué, nous pourrions procéder, à titre indicatif comme suite :

  • Mettre en place un protocole sanitaire en collaboration avec les autorités sénégalaises de Dakar à Bamako,
  • procéder par un tri des 1500 personnes recensées sur liste de l’ambassade du Mali au Sénégal en mettant les femmes ; les enfants et les personnes âgées en priorité.

(Il y’a de forte présomption qu’il y’a des doublons ou des personnes ne répondant pas aux critères de rapatriement sur cette liste).

  • Négocier avec les transporteurs maliens qui ont plusieurs dizaines de bus également bloqués ici au Sénégal. Puis une fois par semaine faire un convoi avec escorte d’un certain nombre de bus jusqu’à Bamako en fonction de la capacité d’accueil des hôtels qui ont été réquisitionnés pour le confinement.

Sans une réaction adaptée et rapide  du gouvernement Malien nous allons droit vers une crise humanitaire qui touchera des citoyens maliens bloqués ici au Sénégal.

Eu égard aux lenteurs suspectes par rapport à la gestion de ce dossier, il est  légitime  de se poser la question suivante :

Où est donc l’honneur du Mali?

Dakar le 24 mai 2019

Charles E. Dembélé

Gestionnaire

cedembele@yahoo.fr

- Advertisement -

commentaires
Loading...