Son règne a commencé avec fracas et risque de se terminer insipide. Ndèye Fatma Dione, Miss Sénégal fraîchement élue, n’a pas eu le temps de savourer les délices de la couronne. Le coronavirus est passé par là et jusque-là, rien de bien attrayant n’a rythmé son quotidien de reine de beauté. Obligée de passer sous silence tous ses rêves auréolés de gloire, elle nous relate son quotidien miné par la crise sanitaire. Un point sur lequel, la Miss Fatick s’est particulièrement attardée, pour marquer son désaccord sur la répartition des fonds accordés aux acteurs culturels. Non sans ouvrir une parenthèse sur son statut de célébrité qui attise les convoitises…
Vous êtes aphone depuis votre élection. On devine aisément que la crise sanitaire qui sévit dans le pays et le monde, en est la principale cause. Comment la vivez-vous ? Quel est le quotidien de Miss Sénégal ?
Effectivement, je n’ai pas fait trop d’apparitions depuis mon élection. La raison, on la connaît tous. La crise sanitaire nous a tous mis du plomb dans l’aile. Comme le commun des Sénégalais, je suis obligée de la subir, même si ce n’est pas évident de voir ses déplacements réduits. J’essaie au mieux de respecter les consignes et les gestes barrières édictées pour lutter contre ce virus qui nous pourrit la vie depuis trois mois. Mon quotidien de Miss Sénégal est le même que celui de beaucoup de jeunes-filles en ce moment. Je dirais même qu’il est monotone et facile à imaginer. Je sacrifie au rituel des prières quotidiennes, je donne un coup de main pour les tâches ménagères, je passe du temps avec les membres de ma famille. Cela m’a aussi permis de raffermir les liens avec mon jeune-frère, le cadet. J’ai pu découvrir chez lui, des talents que je ne lui connaissais pas. C’est un mordu des réseaux sociaux et il en maîtrise tous les contours. J’avoue que c’est l’un des seuls avantages du confinement. On profite au maximum pour vivre des moments privilégiés avec la fratrie, ce qui, en temps normal, est difficile. On court dans tous les sens et le temps fait défaut. J’ai également eu des moments à moi que je mets à profit pour mes révisions, histoire de ne pas perdre la main. Naturellement, comme il fallait s’y attendre, j’ai joué mon rôle d’ambassadrice en sensibilisant la population sur les méfaits du coronavirus. Dans la même veine, sur le plan international, par le biais des réseaux sociaux, j’ai eu à faire des séances de télé-travail avec une de mes collègues, la Miss Pérou.
Tous les secteurs sont actuellement au ralenti, Miss Sénégal n’est pas non plus épargné. Votre agenda est en stand-by et on peut dire que vous n’avez pas profité des avantages de votre couronne, des voyages et autres. Cela ne vous affecte pas ?
C’est vrai que tout est au point mort. En y pensant, toutes les activités prévues auxquelles j’aurais dû participer, les voyages annulés, l’expérience que j’aurais pu acquérir au fil de ces mois, j’ai quand-même un petit pincement au cœur. Avec mon élection, je nourrissais plein de rêves et d’ambitions mais là, j’ai les mains liées. Tant que la pandémie persiste, tout est remis en question. N’empêche, il faut tout de même, rester optimiste et ne pas trop broyer du noir. Certes, je suis déçue mais, puisque c’est une crise mondiale, on tend les mains au Bon Dieu, tout en espérant qu’Il nous réserve des lendemains meilleurs.
«J’ai été freinée dans mon élan…»
N’avez-vous pas quelque part été freinée dans votre élan, si l’on sait que vous partiez du bon pied, après avoir essuyé beaucoup de railleries lors de votre sacre ?
Bien-sûr que si ! Je n’ai jamais fait focus sur cette période où sur les réseaux sociaux, des internautes se sont acharnés sur moi. Mon élection avait été remise en question mais, cela ne m’a pas empêché de garder la tête froide et de renforcer ma personnalité et mes convictions. Qui plus est, nous sommes en démocratie et tout le monde a le droit de donner son point de vue sur moi. Toujours est-il que, même si je suis d’avis que la beauté reste subjective et que je remplissais les critères d’une reine de beauté, mon image en a pris un coup. Je comptais sur l’après-élection pour prouver qui je suis réellement, révéler ma beauté intérieure comme extérieure, faire valoir mes atouts physiques et intellectuels. Malheureusement oui, j’ai été freinée dans mon élan. La pandémie est arrivée et a tout chamboulé. Néanmoins, je garde bon espoir que la vie va bientôt reprendre son cours.
Qu’en est-il de vos études ? Vous préparez votre baccalauréat à l’heure où on agite la réouverture des classes d’examen. Pensez-vous que cela soit prudent, dans ce contexte où l’épidémie gagne du terrain ?
L’année scolaire a été perturbée et jusqu’à présent il y a beaucoup d’incertitudes. Le pire aurait été que nous ayons une année blanche. L’Etat a tenté de procéder à la réouverture des classes pour ceux qui doivent passer des examens mais, ça n’a pas abouti. Espérons que cette nouvelle tentative soit la bonne. Elle semble en tout cas, porter ses fruits, avec les mesures qui ont été prises pour éviter la propagation du virus. Heureusement que par décret présidentiel, le calendrier des examens a pu être réaménagé pour nous donner plus de chance de nous préparer en conséquence. Cependant, j’avoue que je suis animée d’une grande crainte, à l’heure où les cas communautaires dictent leurs lois sous nos cieux. Que dire des cas asymptomatiques. Nous devons redoubler de prudence.
«Mon défi, être Miss et décrocher mon bac»
Vous sentez-vous prête à passer votre examen, après être restée trois mois sans faire cours ?
Ah! La grande question… Vous savez durant toute l’élection de Miss Sénégal, j’ai perdu énormément de temps dans mes préparatifs. Entre le casting régional, la mise au vert, grande finale à Dakar, cela nécessitait du temps et de la concentration. Une fois l’élection passée, j’envisageais de carburer, mettre les bouchées doubles pour rattraper les heures de cours perdues. Hélas, les cours ont été suspendus sur toute l’étendue du territoire national. Il fallait donc trouver d’autres alternatives pour me remettre à niveau. J’ai la chance d’avoir des professeurs dévoués et nos cours se passaient sur Wahts’App. Je voudrais par la même occasion, saluer l’initiative de certaines chaînes de télévision qui ont mis en place un système, comme la Salle des profs de la TFM, pour dispenser des cours en direct. Les radios n’étaient pas non plus en reste. Ainsi, je me sens confiante et prête à terminer l’année en beauté, en décrochant mon baccalauréat. C’est même un défi pour moi, être Miss Sénégal et lauréate du baccalauréat.
Que vous inspire le fait que le comité de Miss Sénégal n’ait pas été pris en compte, dans la répartition des fonds dédiés à la culture dans le cadre de la Force Covid ?
Avant Miss Sénégal, je vivais dignement grâce au Bon Dieu et je ne me plains pas. Alhamdoulillah ! Le comité également, malgré les difficultés qu’elle a eu à rencontrer dans les différentes organisations, a toujours tenté tant bien que mal, d’apporter sa pierre à l’édifice de la mode et de la culture en général. Avec ou sans la contribution de l’Etat. Donc, je pense que cela aurait été juste de les associer à cette répartition. Il la mérite à juste titre. Toutefois, dans ce monde, l’injustice est la chose la mieux partagée. Ce manque de soutien constant des autorités étatiques, n’a jamais été un frein pour le comité. Par contre, vouloir extirper Miss Sénégal de l’espace culturel, revient à méconnaître, les principaux éléments de ce secteur.
Cela veut dire que vous êtes en porte-à-faux avec ceux qui pensent que vous ne faites pas partie du secteur de la mode, encore moins de la culture ?
Ça c’est leur point de vue. Mais pendant l’élection, toutes les facettes de la culture sénégalaise ont été montrées. Peut-être que leur conception de la mode est autre. En amont, dans chaque région, les stylistes et modélistes s’approprient le thème annuel pour montrer leur savoir-faire. Sans compter les créations, les coiffures qu’on met en avant tout au long du processus. La quasi-totalité des membres des comités régionaux, font partie de l’association des couturiers du Sénégal.
«La couronne sur la tête, rend la proie plus exposée»
Depuis votre sacre, qu’est-ce qui a changé dans votre vie ?
Pas grand-chose, je dirais ! Mais, j’ai eu à faire des rencontres et partager des plateaux avec des célébrités comme Brill figth for, l’Ass des Ass. J’ai participé à des Meet-up sur divers sujets économiques et d’entrepreneuriat avec des magnats de la trempe de Manar Sall de Petrosen, Mamadou Kassé, directeur de la Sicap, Birane Ndour du groupe Futurs Médias, Pape Mao Diouf de l’ASTP, Lagani Sakho de l’Onas, Yaye Fatou Diagne, une femme leader et tant d’autres. Naturellement, le regard des gens a aussi changé sur moi, depuis qu’ils m’ont vue être couronnée. Dans ma région de Fatick, je fais figure de célébrité locale. La preuve, l’accueil qui m’a été réservé après mon élection. Toutefois, mes fréquentations sont restées les mêmes.
Quid des prétendants qui vous tournent autour ? La liste s’est-elle allongée avec la couronne de la plus belle fille du Sénégal, sur votre tête ?
Oui, évidemment ! Comme vous le savez, avec une couronne aussi prestigieuse sur la tête, la visibilité rend la proie plus exposée. Malgré le fait que le coronavirus a imposé sa loi du «restez chez vous» et du respect de la distanciation sociale, les hommes ont toujours une parade. Cette fois-ci, ce sont les réseaux sociaux. Je dirais que la liste s’est bien allongée et bien au delà de nos frontières. Je n’en dirais pas plus…
Quelle est la chose qui vous tient le plus à cœur que vous ferez à la fin de la pandémie ?
J’aimerais avant tout, relever le défi de décrocher mon bac et par la même occasion, montrer aux jeunes filles que personne ne peut nous assurer notre réussite, hormi nous- mêmes. Il faut que nous croyons en nous, en nos capacités, en notre âme de leader. Avec de la volonté et de l’abnégation, on peut y arriver. J’aimerais bien aussi découvrir le monde, faire des shootings, être une actrice dans la mode et mener à bien ma mission, d’ambassadrice.
Si vous aviez un message à l’endroit des Sénégalais, quel serait-il ?
Ce n’est pas un message mais plutôt des prières. Je prie le ciel, pour mon pays et pour le monde entier, afin que cette maladie disparaisse à jamais et que tout le monde puisse reprendre ses activités. Que Dieu bénisse le Sénégal…
MARIA DOMINICA T. DIEDHIOU
IGFM