De Richard Bona à Charlotte Dipanda en passant par Patrice Nganang, les artistes sont de plus en plus nombreux à s’exprimer contre le président. En face, la réplique des partisans du régime ne s’est pas fait attendre.
Richard Bona, bassiste de renom d’origine camerounaise, a dévoilé le 2 juin dernier son dernier single «Allô Fokou», un pamphlet contre le régime de Yaoundé.
Dans cette chanson qui cumule plus de 268.000 vues sur YouTube, il invite les membres du gouvernement et les pro-Biya à se rendre chez Fokou, célèbre chaîne de magasins dans le pays, pour acheter des cordes afin de se pendre.
«La vraie pandémie, c’est Paul Pillard / 38 ans de dictature, c’est fini / On ne peut plus parler, on ne peut plus crier / Il nous reste qu’une chose à faire, c’est d’appeler Fokou / Allô Fokou, envoie-leur des cordes / Allô Fokou, fais tomber des cordes», chante Richard Bona.
Le musicien, qui a acquis la nationalité américaine en 2005, s’illustre depuis quelques années en pourfendeur du régime de Yaoundé. Mais il n’est pas le seul.
Comme lui, d’autres artistes camerounais prennent ouvertement position contre Paul Biya. En mai dernier, la chanteuse Charlotte Dipanda avait créé la polémique avec ses propos sur l’alternance politique au Cameroun lors d’une interview télévisée.
«Je pense qu’il est temps qu’on nous propose autre chose. Il est temps que le Cameroun se développe parce que tant qu’il n’y a pas d’alternance, il n’y a pas véritablement de développement possible. Je pense que l’Etat actuel est arrivé au bout de ce qu’il pouvait proposer au Cameroun et que, humblement, il gagnerait à céder la place à une nouvelle gouvernance», avait-elle déclaré.
En 2013 déjà, le cinéaste Jean-Pierre Bekolo imaginait déjà Paul Biya quitter le pouvoir dans son film «Le président». «Au Cameroun, la réalité dépasse souvent la fiction et je ne pouvais me contenter de la fiction! C’est une forme de thérapie. Tout un peuple sait que son président va partir mais personne ne peut en parler. Il y a une angoisse réelle. Tous les scénarios, même les plus apocalyptiques sont envisagés, et mon film vise à prévenir, atténuer, désamorcer cette angoisse. Il faut que les Camerounais se fassent leur propre film en regardant le mien, pour sortir de cette prison mentale qui leur interdit d’imaginer l’avenir», déclarait-il à Jeune Afrique.
Quant à l’écrivain Patrice Nganang, qui jouit de la nationalité américaine, il est connu pour ses positions tranchées contre le régime de Yaoundé. Il avait été expulsé du Cameroun en décembre 2017, après avoir menacé de mort le président dans un post publié sur sa page Facebook.
En face, la réplique des partisans du régime ne se fait pas attendre. Le fils de l’homme d’affaires Bernard Fokou, par ailleurs cadre au RDPC (le parti au pouvoir) a notamment répondu à Richard Bona dans une vidéo. «Allô Bona, nous n’avons pas de cordes de guitare / Allô Bona, précise ta commande…», ironise, en chanson, Dieunedort Fokou, directeur commercial adjoint du groupe fondé par son père.