Faux billets, faux gels, faux médecins, faux diplômes : Le Sénégal, un pays d’escrocs !

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SENTV : De plus en plus, les médias rapportent des cas de fraude sur un produit, un diplôme et une fonction. Au point que l’on se demande si la société sénégalaise n’est pas une société de tricheurs ? Radioscopie avec le psychologue-clinicien Serigne Mor Mbaye et le sociologue, Djiby Diakhaté.

Après le scandale de la fabrication de faux gels antiseptiques mis à nu en mars 2020, par le service du commerce intérieur départemental de Pikine, l’affaire du faux docteur Samba, une autre révélation vient encore flétrir l’image déjà sérieusement écornée du Sénégalais. «78% des flacons de gels hydro-alcooliques vendus un peu partout au Sénégal sont inefficaces au coronavirus». La révélation est le fruit d’une étude faite par des chercheurs sénégalais de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD). «Il n’y a aucune de ces marques qui respecte à 100 % les informations sur l’étiquetage, explique Dr Diaby, microbiologiste et membre de l’équipe d’étude des gels, interrogé par Radio Sénégal et repris par emedia.sn le 23 août dernier. Il n’y en a que quatre ou cinq qui disent quel alcool ils utilisent. Les autres mettent tout simplement alcool. La norme sénégalaise, c’est 60 %. Alors, on a fait le dosage de l’alcool avec le département de Chimie. Et on s’est rendu compte que sur les quatorze marques, il n’y en avait que deux qui dépassaient les 60%. Trois autres sont très proches de 60%. On peut considérer que les cinq sont dans une moyenne, et tout le reste est entre 30% jusqu’à 45% d’alcool. Ce qui est insuffisant.» D’où leur inefficacité sur les microbes, virus et autres bactéries. Car, sur les quatorze gels, deux donnaient de bonnes réponses, certaines avaient une bonne réponse sur l’une ou l’autre bactérie, mais la plupart, 78% des gels, avaient un effet très faible parfois même nul. On a trois gels qui avaient un effet nul». Une révélation qui donne des sueurs froides et qui pousse à s’interroger sur la société sénégalaise. A savoir si elle est une société de tricheurs. Si l’on sait que le pays de la Téranga a déjà une longue histoire avec le faux. Faux billets, faux diplômes, faux gels, faux médecins, la liste est longue comme le bras et justifie le verdict du psychologue-clinicien Serigne Mor Mbaye, qui est sans appel : «le Sénégal est un pays d’escrocs». «La triche n’est plus juste banalisée, je dirai que la triche est la chose au monde la mieux partagée. Les valeurs qui ont cours dans la société ne riment pas avec honnêteté et responsabilité. Le Sénégalais est quelqu’un qui passe 50% de son temps à vouloir escroquer quelqu’un. Et les autres 50%, à exister par l’escroc. C’est ce qu’il traduit par l’expression «Door marteau». Ils disent cela d’une façon tellement hilare et banale que tu comprends en fait que les histoires de «diom (dignité)», «mougn (résilience)» et «kersa (pudeur)» sont juste des propos incantatoires qui ne signifient rien», argue-t-il. A tel point qu’«on a l’impression que même les sanctuaires qui étaient épargnés jusque-là, en raison des valeurs qui déterminaient leur fonctionnement, ont tendance à tomber sous le travers de la tricherie», ponctue le sociologue Djiby Diakhaté. Qui convoque comme preuve la fraude mise à nu lors du concours des élèves maîtres, celle du Bac, en 2017, l’affaire du faux médecin, le docteur Samba. Ou encore, plus récemment les magistrats qui s’accusent de tricherie. «Aucun secteur n’est épargné. Quand dans les domaines de l’éducation, de la magistrature, de la médecine, pour ne citer que ceux-là, on trouve des cas de tricherie, c’est montrer, si on n’y prend garde, que la tricherie qui est en train de se développer, risque d’atteindre des proportions qui désarçonneraient le fondement de notre société. Beaucoup de nos compatriotes pensent qu’il faut utiliser des raccourcis voire des combinaisons hors-la-loi pour réussir dans leur projet.» D’autant plus que, poursuit Serigne Mor Mbaye, «les religions n’y font absolument rien». «Il y a comme une dissonance entre l’idéologie religieuse et la pratique quotidienne. C’est une société schizophrénique entre l’idéologie qu’on clame et les pratiques quotidiennes. C’est un sauve-qui-peut où les gens peuvent tout faire pour gagner de l’argent. Toutes les institutions sont enrôlées dans cette dynamique d’escroquerie.» Dans une société où le leitmotiv, «la fin justifie les moyens», est utilisé comme une justification, où il n’existe pas de modèles qui jurent d’avec ces pratiques, le sociologue estime que «le mérite ne constitue plus le chemin le plus efficace pour accéder à la réussite». «Nous sommes dans une société qui devient de plus en plus individualiste et matérialiste. La compétition est rude, âpre, inhumaine et tous les moyens sont bons pour parvenir à ses fins. Quitte à écraser les autres. Le travail ne constitue plus le moyen le plus sûr pour réaliser ses projets. Les valeurs, les modèles et références qui guidaient l’individu sont en train de s’effriter. Les modèles sont happés par le jeu de l’avoir», argumente-il. D’où l’impératif, selon Serigne Mor Mbaye, de «réinventer une nouvelle société». «Cela ne veut pas dire que cette société en cours n’a pas de valeurs. Si, elle en a, mais des valeurs qui ne sont pas opérationnelles pour développer un pays et le rendre civilisé. Il ne faut pas rêver. Il y a une base de valeurs positives sans laquelle, il est impossible de bâtir une société démocratique, de justice sociale et d’équité.» C’est dit !

IGFM

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