Contribution 500 pages d’un TAS d’omissions, de déni et de narcissisme (Par Mamadou NDIONE DG du COSEC)
SENTV : « Quand la mémoire va chercher du bois mort, elle ramène le fagot de son choix » nous apprenait Birago Diop. Cette vérité pourrait s’appliquer au livre de Thierno Alassane Sall dit TAS.
Tout au long des 500 pages du livre « Le protocole de l’Élysée » de Thierno Alassane Sall, transparaît le profil psychologique du candidat malheureux au parrainage de l’élection présidentielle sénégalaise de 2019.
Il faut lire les 404 premières pages du livre pour enfin voir le titre éponyme « Le protocole de l’Élysée » avec un chapitre de seulement 37 pages dans lesquelles TAS explique de façon laconique sa frustration lors de la signature de protocoles dans le cadre d’une visite d’Etat en France du Chef de l’État.
Après ces 37 pages, TAS dans un chapitre qui qualifie le palais de la République du Sénégal de « Palais de l’ancien Gouverneur général de l’AOF » raconte dans 22 pages la journée du 2 mai 2017, durant laquelle il a été démis de ses fonctions même si, amnésique, il dit avoir démissionné curieusement sans traces de démission. Un ancien Ministre qui ramène le palais présidentiel à l’histoire coloniale est assez excessif dans son jugement qui est aussi un marqueur de son profil intrinsèque. Passons au livre ! 37+22 = 59. Ce livre exutoire aurait pu tenir sur 59 pages.
Il fallait pour TAS grossir la rédaction dans un livre de 500 pages qui commence dans l’avant-propos par une amnésie qui en dit long sur ce désir ardent de paraître comme le héros du siècle. Thierno est le premier admirateur de TAS. Grosse entorse à la vérité, TAS écrit à la page 9 : « À ma démission du ministère de l’énergie du Sénégal le 2 mai 2017. ».
La vérité est qu’il n’a pas déposé de lettre de démission. Il l’aurait fait, cette lettre serait sans doute reprise pour la postérité dans les annexes du même livre.
Pour l’histoire, il n’y a pas de traces d’un quelconque dépôt de lettre de démission. Par contre, dans la matinée du 02 mai 2017, avant de prendre très tôt son vol pour le sommet économique de Durban, par décret « numéro 2017-696 du 2 mai 2017, le Président de la République a mis fin aux fonctions de Monsieur Thierno Alassane Sall, Ministre de l’Énergie et du Développement des Énergies renouvelables ». J’étais moi-même du voyage pour Durban invité par le Chef de l’État et je confirme qu’avant le décollage, l’information sur le limogeage de TAS était déjà sur la place publique.
Un livre de 500 pages qui commence par une amnésie et un déni de réalité avec une supposée démission sans preuve battue en brèche par un décret matinale connu de tous est assez éloquent du désir ardent de paraître comme un super héros jusqu’à tordre le bras à la vérité.
Pour meubler le livre et lui donner du volume, TAS raconte son histoire à sa façon. Il parle de sa vie de représentant de l’ASECNA au Sénégal puis à Moroni, de DG de l’ARTP, de Ministre des Infrastructures et des Transports. Dans ces pages, il se peint en héros et cloue au pilori tout son monde notamment le régime du Président Wade. TAS, fait fi durant sa version de l’histoire de cette période « wadienne » du combat des autres et tire une belle couverture sur « TAS le guerrier ».
Dans la partie où TAS parle enfin de son passage au ministère de l’énergie, il prend soin de ne pas écrire que durant les 680 jours de présence à ce poste, il a défendu publiquement la politique énergétique du Sénégal et les options de totale transparence du Chef de l’État dans sa Gouvernance pétrolière. Oui, 680 jours de défense d’un régime valent plus qu’un instant de défiance aux mobiles autres que d’intérêt national.
Dans le livre, Thierno nous apprend qu’il a signé effectivement le MOU avec TOTAL à l’Élysée avant de refuser selon ses dires de signer l’accord avec cette multinationale quatrième mondiale au motif que les intérêts du Sénégal n’étaient pas bien pris en compte comparativement aux autres propositions. Le subconscient de TAS nous apprend au passage ses allergies pour la France.
En vérité, Thierno, Ministre de l’énergie, oublie que la notion d’intérêt pour le pays est plus vaste et englobe des questions géopolitiques liées à une volonté de ne pas tout donner à une seule multinationale.
Les multinationales KOSMOS et BP qui étaient déjà présentes dans les deux blocs de Saint Louis Offshore devaient-elles bénéficier du bloc Rufisque offshore Profond ? À cette question géopolitique, l’avis d’un Ministre de l’Énergie ne saurait faire décision. L’humilité et l’intelligence auraient poussé à avoir plus d’épaisseur stratégique pour comprendre la décision de la seule autorité investie de la légitimité, le Président de la République.
Il est malheureux de voir qu’un Ministre de l’Énergie obnubilé par ses avis vitaux ne puisse avoir l’épaisseur pour comprendre l’enjeu géopolitique et stratégique d’une décision dictée par les intérêts globaux du pays.
La question de savoir pour qui roule TAS ne se pose pas à la lecture du livre. Il est clair qu’il roulait pour KOSMOS et BP. L’anti-TOTAL était d’abord un pro-KOSMOS-BP dans un contexte où l’option du pays était, pour des raisons que TAS n’a pas l’intelligence de comprendre, à l’élargissement de la base des partenaires pour la recherche et le partage de la production. TAS a semblé, dans des déclarations après la fin de sa mission au ministère de l’Énergie, vouloir faire croire que TOTAL avait en 2017 bénéficié d’un cadeau sur un plateau d’argent. L’histoire a prouvé, deux ans plus tard en septembre 2019, le contraire puisqu’après avoir investi plus de cinquante milliards de FCFA dans la recherche dans le bloc Rufisque offshore profond, TOTAL n’a rien trouvé. Dans son livre paru en 2020, le censeur TAS prend soin de ne pas parler de cela.
En définitive, pour résumer le livre de TAS, on pourrait dire qu’il s’agit d’un long texte d’un égo surdimensionné écrit avec l’aide de bons plumitifs dont les apports dans le style n’ont pas pu permettre de faire passer la pilule.
Ce livre de 500 pages est un texte écrit par un super activiste nostalgique d’un grand soir illusoire qui, après avoir été à des postes stratégiques, n’a pas compris les enjeux géostratégiques d’un Monde où le refus n’est pas le seul acte de courage. Le courage est dans la conduite des affaires avec un réalisme intelligent dans un Monde moins binaire où les équations à résoudre sont plus complexes que le choix basé sur l’idéologie.
Sur la gouvernance pétrolière, ce qui différencie le Président Macky Sall des opposants inexpérimentés c’est le réalisme intelligent dans les choix sur une question aussi explosive. Pour mieux appréhender la patriotisme intelligent du Chef de l’État, il faut savoir qu’après le nouveau code pétrolier de 2019, notre pays qui était dans la stratégie marketing du code de 1998 est entré dans une nouvelle phase confirmée par la loi sur le contenu local votée le 24 janvier 2019 dans le secteur des hydrocarbures.
Avec cette loi, toutes les entreprises évoluant sur la chaine de valeur pétrolière auront l’obligation de choisir des travailleurs sénégalais. Les entreprises doivent obligatoirement permettre le remplacement progressif des expatriés étrangers par des travailleurs nationaux qui auront bénéficié d’un renforcement de capacités grâce à l’Institut National du Pétrole et du Gaz et des autres structures de formation agréés.
De plus, nos entreprises seront choisies en priorité sur tous les appels d’offre de la chaîne de valeurs pétrolière et gazière allant de l’exploration à la distribution en passant par la production, la transformation et le transport sans compter toutes les activités, services et autres prestations intellectuelles connexes. Cette loi consacre qu’il y aura des activités exclusivement réservées aux sociétés sénégalaises qui respectent les standards et normes du secteur, sans compter des activités réservées exclusivement à des entreprises mixtes constituées de sociétés sénégalaises associées à des firmes étrangères qui leur garantissent un transfert de compétences.
Avec la loi sur le contenu local, la préférence nationale sera obligatoirement respectée dans les appels d’offre par les entreprises qui accorderont la priorité aux sous-traitants locaux en ouvrant aussi leur capital au niveau national aux investisseurs sénégalais.
En vérité, le vrai débat sur les questions pétrolières et gazières est dans le contenu local. Le Président Macky Sall qui a réglé depuis 2013 avec l’ITIE et la publication de tous les contrats en ligne, la question de la transparence, a imprimé et partagé, avec la loi sur le contenu local et le nouveau code pétrolier, sa vision d’homme d’État, expert pétrolier.
Ce n’est pas un livre écrit comme exutoire de frustrations d’un ancien Ministre prétentieux qui changera l’excellente appréciation de la gouvernance pétrolière du Sénégal. Les 500 pages du livre de TAS lui ont juste permis de peindre seul sa vie, à sa façon, en prenant le soin de censurer des parties importantes. Comme dirait feu Birago Diop la mémoire de TAS n’a ramené que le « fagot de son choix ».
TAS qui nous apprend qu’on avait donné à TOTAL une zone où il y avait du pétrole, a oublié que le bois n’était pas encore mort. Deux ans après son limogeage du Gouvernement, TOTAL a cherché et foré après avoir mis cinquante milliards de FCFA et n’a rien trouvé. Comme quoi, dans un tas de bois mort, il peut toujours y avoir un qui vit pour rétablir la vérité.
TAS est dans son droit d’avoir des « allergies intéressées » en fonction des nations. Notre pays est dans l’obligation de travailler avec toutes les nations sans allergies idéologiques ou autres motifs non avoués par un Ministre qui raconte qu’il n’a pas pu être joint par son Boss dans des moments importants du processus de prise de décision. Pourquoi et pour qui ces moments (sciemment organisés ?) d’injoignabilité ? Ce monsieur à l’ego surdimensionnée s’est érigé en un « activiste super activé ». Son livre a oublié de dire pourquoi, par qui ou pour qui. Le « moi omniprésent » en dit long sur le profil de celui qui s’était refusé d’accompagner un quelconque des cinq candidats à l’élection présidentielle de 2019. Autre signe évident qui n’a pas besoin d’être décrypté.
Par Mamadou NDIONE
DG du COSEC