Encours de 839 milliards en 2018-polémique autour de la dette

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ENCOURS DE 839 MILLIARDS EN 2018-PoléA l’ouverture de la session budgétaire, il a été beaucoup question, samedi dernier, de la dette du Sénégal. Son encours, qui est de 839 milliards en 2018, était au cœur des attaques-ripostes.

Le marathon budgétaire a débuté, samedi dernier, à l’Assemblée nationale. Comme d’habitude, c’est le ministère de l’Economie et des Finances, en charge de la caisse de l’Etat, qui est passé en premier à l’hémicycle. Pour 2018, le budget national s’élève à 3 709,1 milliards de francs Cfa. En comparaison à celui de l’année dernière, qui était de 3 360 milliards, il y a eu une hausse de 349,7 milliards, soit 10,4 % en valeur relative. Un ‘’record’’ salué par la majorité présidentielle qui y voit une efficacité dans la mobilisation des fonds. ‘’La performance des régies financières’’, selon les mots du ministre de l’Economie et des Finances Amadou Ba.

Il n’y a pas de quoi pavoiser, rétorque le député Ousmane Sonko. D’après l’ancien inspecteur des impôts et domaines, radié par l’actuel pouvoir, le budget du Sénégal a constamment augmenté, depuis 1960, à l’exception de la crise de 1979 et l’année de la dévaluation du franc Cfa. ‘’Ceux qui croient que la hausse d’un budget est une performance, se trompent eux-mêmes. Arrêtons les félicitations pour un plus sur un budget. Ce qu’il faut regarder, c’est plutôt la proportion de l’augmentation, année par année. Or, sur ce point-là, nous sommes sur une tendance baissière’’, soutient-il.

Par ailleurs, la croissance attendue, cette année, est de 7 % contre 6,8 % en 2017. La partie destinée à l’investissement (Bci) a, elle, connu une hausse, passant à 1 339,5 milliards, soit 114,3 milliards de plus (9,3 %) que l’année précédente. Mais, il y a surtout l’encours de la dette publique qui s’élève à 839 milliards contre 680 milliards l’année dernière. La dette totale extérieure est de 3 714,4 milliards de francs Cfa contre 1 597,7 milliards pour celle antérieure. Le sujet a d’ailleurs largement été abordé par les intervenants. En commission déjà, les députés ont interpellé le ministre du Budget Birima Mangara sur les mesures envisagées pour la contenir, ‘’d’autant plus qu’elle peut avoir un impact direct sur notre souveraineté’’.

En plénière, l’opposition a saisi la balle au bond. ‘’Je regrette que la seule vision du président Macky Sall soit de s’endetter. S’endetter pour distribuer ou investir dans le néant’’, a raillé Madické Niang. Selon Toussaint Manga, en 2012, lorsque le Pds quittait le pouvoir, la dette totale du Sénégal était de 2 704 milliards pour un budget de 2 299 milliards. En 2018, elle s’élève à 5 312 milliards pour un budget de 3 709 milliards. Autrement dit, le régime actuel a davantage creusé le trou. Moustapha Guirassy ne se pose pas de question sur la capacité de remboursement. Son souci est de savoir si l’argent emprunté est investi dans des projets structurants et, surtout, si ces projets entrainent l’adhésion du maximum d’acteurs, notamment le privé national. Ce qui, de son point de vue, n’est pas le cas. Cheikh Abdou Mbacké, quant à lui, s’inquiète de cette montée et veut savoir l’échéance que l’Etat s’est fixée pour le remboursement.

Seul pays de la Cedeao à faible risque de surendettement

En guise de réplique, les députés de la majorité ont déclaré au ministre Amadou Ba qu’il fait de l’endettement intelligent. Les sommes mobilisées sont destinées, selon eux, à des investissements utiles. Pour Aymirou Gningue, par exemple, la vraie question, ce n’est pas la dette. L’essentiel est de savoir pourquoi on s’endette et où on met l’argent. ‘’Ne pas s’endetter, c’est de l’anti-économie. Endettez-vous, tant que vous n’aurait pas dépassé les 70 % (seuil de l’Uemoa). Si vous avez réussi à lever près de 7 000 milliards sur le marché financier, c’est parce qu’on vous fait confiance. Continuez, vous êtes sur la bonne voie’’, galvanise-t-il.

Dans sa réponse, le ministre des Finances a d’abord porté la réplique à ses adversaires. ‘’Le Sénégal est un pays assez particulier. En fonction du climat, on est spécialiste de tout, on parle de tout. Et, malheureusement, souvent, on parle de choses qu’on ignore’’, lance-t-il. Selon lui, il n’existe pas au monde un pays non-endetté, même les plus développés. Mais que l’évaluation commence quand on parle de surendettement. Et sur ce point, il n’y a pas à s’inquiéter. ‘’Le Sénégal est le seul pays de la Cedeao qui a un risque de surendettement faible. Est-ce que les autres pays sont mal gérés ? De grâce, arrêtons ce débat’’, invite-t-il. A en croire Amadou Ba, le pays ne s’endette pas comme bon lui semble. A ce jour, dit-il, il y a 700 chantiers en construction dans le pays.

Les aveux d’Amadou Ba

Selon lui, ce qui est grave, c’est de contracter des dettes et de voir le déficit décrocher. Il s’y ajoute, selon lui, que les partenaires financiers ne sont pas des enfants de chœur. S’ils font confiance à un Etat, c’est parce qu’il remplit deux critères : un système fiscal performant et l’utilisation des ressources allouées dans des dépenses utiles.

Ainsi, si les bailleurs prêtent au Sénégal, c’est parce qu’il est solvable. En guise d’exemple, le ministre soutient que le pays a fait un Euro-bond de 250 milliards de francs Cfa sur le marché, en 2011, pour un taux de 8,75 %.

Après trois ans, le même montant a été mobilisé pour un taux de 6,75 %. Entre 2014 et 2017, la Bad a accordé au Sénégal des crédits dont le montant total est trois fois supérieur aux dettes antérieures étalées sur près de 40 ans. Ce qui, selon lui, se justifie par la bonne tenue des finances. ‘’L’ensemble des critères retenus pour les institutions de notation (Moody’s, Mo Ibrahim) sont respectés par le Sénégal’’, affirme-t-il. Il s’y ajoute que le taux d’accroissement de la dette a baissé, passant de 21 % en 2011 à 13 % en 2017.

Pour autant, le ministre de l’Economie et des Finances a fait des concessions sur la question. Amadou Ba reconnait que, vu le niveau de la dette, il y a lieu d’être vigilant, d’évaluer tous les projets financés. ‘’Le service de la dette est arrêté à 839 milliards ; un chiffre important, c’est vrai, que nos services surveillent avec l’ensemble des partenaires’’. Nous surveillons l’ensemble des indicateurs pour rester un pays à faible risque de surendettement’’, admet-il, non sans préciser que le gouvernement travaille à ce que la gestion budgétaire soit la plus rigoureuse, la plus transparente.

BABACAR WILLANE-enquetemique Autour De La Dette

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