Elle a été récemment admis à faire valoir ses droits à une pension de retraite. La nouvelle retraitée qui disait partir sans… partir a, naturellement, son mot à dire sur la situation que vit l’UCAD avec le départ de massif des enseignants de rang A.
Elle décrit d’abord le parcours combattant qui est celui des profs qui réussissent à plafonner dans leur corps. « On ne crée pas un professeur titulaire de classe exceptionnelle du jour au lendemain. Le monde a été fait en sept jours. C’est tellement long. Vous êtes assistant, vous préparez une thèse pendant des années pour devenir docteur. Après le doctorat, vous préparez un concours qui est difficile avec une préparation très longue. Après l’agrégation, vous soumettez un dossier avec des articles scientifiques de grande envergure pour devenir professeur titulaire. C’est très long. C’est un gros effort. Les professeurs de rang magistral, on ne les crée pas sur un coup de baguette magique. Le professeur qui a traversé toute cette période de travail, de réflexion, est quelqu’un qui a une maturité, une expérience, une autorité qu’il n’est pas facile d’acquérir » témoigne le Pr Aminata Sow Sidibé .
Pour elle, il faut encadrer aussi ceux qui doivent prendre la relève, les thésards, les doctorants, les agrégés … Il faut du temps pour renouveler le personnel enseignant de rang magistral.
« Si ce n’est pas fait, prévient-elle, c’est l’enseignement qui va en pâtir »parce que c’est une question d’encadrement de la relève d’abord en leur faisant soutenir des thèses de doctorat, en les appuyant pour qu’ils puissent passer les concours d’agrégation, en leur inculquant les bonnes pratiques. Autrement dit, ce sont les vieilles marmites qui font les bonnes sauces.
D’après Mme Sidibé, il y a aussi des risques d’impact sur les performances du Sénégal au niveau international. « Cela va se ressentir. Dans le cadre de la recherche, ce sont des chercheurs de très haut niveau qui doivent encore participer à la production universitaire, intellectuelle, à l’élaboration des grandes politiques. Dans certains pays comme les Etats Unis, on a un système qui valorise cette recherche. C’est un gâchis s’ils s’arrêtent », souligne-t-elle. « Il faut proroger, voir comment faire pour que cet enseignant qui est à la fleur de la réflexion, au summum, au top, puisse être prorogé comme cela se fait dans d’autres pays où on sait la valeur de cet enseignant ». Tout en précisant que » sera selon la volonté de l’enseignant ». Elle révèle que des discutions sont déjà en cours. « Le combat est de voir comment proroger cela sans impacter les dépenses pour rendre soutenable la dépense. Par exemple, il est proposé qu’un professeur titulaire parte à 70 ans, qu’un maître de conférences puisse partir à 68 ans et que les autres puissent partir à 60 ans. C’est une réflexion qui est menée, mais il n’y a pas encore de loi » confie-t-elle.