Depuis mardi, la justice s’administre au ralenti A cause d’une grève de 72 heures décrétée par les travailleurs de la justice, le palais de justice de Dakar observe une baisse de ses activités.
Avocats et usagers de la justice se plaignent des désagréments causés par cet arrêt de travail temporaire observé par greffiers et Cie.
L’ambiance habituelle n’est pas au rendez-vous, au palais de justice de Dakar. La grève de trois jours des travailleurs du secteur passe par là. Les activités sont au ralenti. A la porte d’entrée du Tribunal de Dakar, le contrôle est allégé. Quelques rares va-et-vient sont notés, les usagers de la justice se font désirer. A l’intérieur, c’est le même constat. Tout semble être suspendu. Les gens circulent comme des brebis égarées. A l’exception des deux salles d’audience, toutes les autres sont fermées. Le bureau accueil et orientation qui doit guider les justiciables est désert. Trouvé devant la porte de la salle n°1, Me Diabel Ngom, avocat à la cour, se plaint de l’impact négatif de la grève dans le service public de la justice. «C’est là-bas que les gens passaient pour recueillir des renseignements. Ils ne comprennent pas que ce ne sont pas les magistrats qui sont en grève. Le tribunal fonctionne, ce sont les greffiers qui sont en grève. Et cela va impacter sur le fonctionnement du tribunal. Les uns sont venus chercher des casiers judiciaires ou des certificats de nationalité, d’autres pour s’enquérir de la situation de leurs dossiers», explique-t-il. Avant d’ajouter : «Tous les bureaux des greffiers sont fermés. C’est un préjudice incommensurable. Il n’y a que deux salles d’audience qui sont ouvertes. Au niveau de la salle des flagrants délits, il y a un gendarme qui substitue le greffier. Au niveau de tribunal de grande instance, c’est aussi un gendarme qui est là-bas».
Pour ce dernier, dans des cas pareils, il n’y aura pas de délibéré. «Pour qu’il y ait un délibéré, il faut l’existence d’un greffier et sa signature au niveau du dossier. Au cas échéant, ce délibéré ne sera pas valable. C’est pourquoi, les délibérés sont renvoyés jusqu’à la levée du mot d’ordre de grève», indique Me Ngom. Non loin de lui, un autre avocat déplore les dommages que la grève a causés sur le fonctionnement de son travail. «Les audiences ne sont pas tenues. Nous avons des clients détenus. La Cour d’appel a tout renvoyé. J’avais fait un appel pour mon client de 70 ans, afin qu’il puisse être jugé, hier, mais le dossier a été renvoyé jusqu’au 12 avril à cause de la grève», se lamentent Me Boubacar Camara. C’est la raison pour laquelle, poursuit-il, même les jugements qui sont effectués en période de grève causent des problèmes énormes. «J’avais un jugement rendu par le tribunal de flagrant délit dans ces conditions mais je continue à courir derrière le délibéré depuis 3 ans. Celui qui avait remplacé le greffier est un gendarme. Il est parti et les greffiers ne veulent pas le rejuger», laisse-t-il entendre. La grève des greffiers, c’est aussi une baisse du chiffre d’affaires des avocats. Cette profession libérale fait que s’ils ne travaillent pas, leurs clients ne leur paient pas leurs honoraires. «C’est une perte. Elle est très grave, c’est presque le chiffre d’affaires mensuel qu’on perd. Elle tourne autour de 10 à 12 millions pour les cabinets», déplore Me Cissé.
Du côté des usagers, c’est le calvaire. Ils se plaignent des déplacements inutiles. Sous le couvert de l’anonymat, cet individu rencontré devant la porte de sortie avance que c’est au tribunal qu’il a eu échos de la grève. Sinon, il allait rester chez lui. «Je suis venu régler mes dossiers. Je viens d’être au courant qu’il y a grève. Sinon je n’allais pas effectuer un déplacement. Cela m’a causé beaucoup de dommages. J’avais d’autres courses à effectuer. Tout est voué à l’échec», déplore-t-il. Ousseynou Diop, lui est étudiant. Il est venu récupérer son casier judiciaire qu’il avait déposé depuis la semaine dernière. Mais il va devoir rebrousser chemin jusqu’au vendredi qui va coïncider avec la fin de l’arrêt de travail temporaire observé par les travailleurs de la justice, depuis mardi. «La grève nous a causé des retard sur certains dossiers que l’on devait recevoir aujourd’hui. Je suis en train de préparer un concours et que c’est seulement le cassier judiciaire qui me manque. Je suis obligé d’entendre lundi. C’est déplorable. Je devais même déposer un autre mais on m’a fait savoir que c’est impossible à cause de la grève», peste-t-il.
Salif KA (Stagiaire)