SENTV : Comme à la veille de chaque élection présidentielle depuis 2007, Idrissa Seck est de retour sur le devant de la scène médiatique. Sa candidature ne fait guère de doute, même s’il entretient le suspense en jouant au chat et à la souris avec les journalistes. Si elle venait à se confirmer, cette candidature constituerait-elle une révolution ? Va-t-elle redistribuer les cartes et influer sur les forces en présence. À ces questions, on peut aisément répondre : Non.
Idrissa Seck, de par son parcours, son aura, son sens de la formule et sa formidable capacité à susciter le buzz, est encore une figure de premier plan de la vie politique sénégalais. Toutefois, le Président du Conseil Économique, Social et Environnemental ne pèse plus lourd électoralement.
Idrissa Seck n’était, certes, pas candidat lors des élections locales de 2022. La défaite de son protégé, Yankhoba Diattara, sonne néanmoins comme la sienne, et apparaît comme le point final d’un déclin politique amorcé depuis maintenant plusieurs années.
Jamais Idrissa Seck n’avait perdu dans la région de Thiès, son bastion électoral depuis plus d’une vingtaine d’années. À partir de 2002, il y avait remporté toutes les élections locales. Et lors de la présidentielle de 2019, Thiès lui avait fourni l’essentiel des suffrages exprimés en sa faveur. La défaite de Diatara – avec qui la rupture semble proche- fut un revers cinglant qui marque une réelle perte d’influence.
Certains objecteront que nous allons trop vite en besogne, et qu’il n’y a même pas quatre ans, Idrissa Seck a fini second de l’élection présidentielle. Rappelons-leur qu’il était à la tête d’une coalition qui regroupait tout ce qu’il y avait d’opposants sur la scène politique sénégalaise : Abdoul Mbaye, Khalifa Sall, Pape Diop, Moustapha Guirassy, Malick Gackou, Thierno Bocoum, Bougane Gueye, Mamadou Diop Decroix, Cheikh Bamba Dièye, Hadjibou Soumaré, Françoise Hélène Gaye (oui vous avez bien lu), et qu’il n’a obtenu que 20% des suffrages loin derrière les 58% du Président Sall, et légèrement mieux que les 15% du novice, Ousmane Sonko, qui bénéficiait de beaucoup moins de soutiens. Idy, comme on le surnomme, avait donc bel et bien réalisé une contre-performance.
Les Sénégalais avaient compris -l’avenir leur a donné raison- que le duel Macky Sall-Idrissa Seck est un modèle des “fausses luttes spectaculaires des formes rivales du pouvoir séparé”, dont parle Guy Debord.
Le principal problème d’Idrissa Seck c’est Idrissa Seck. Un homme qui a la passion de l’erreur, adepte des choix stratégiques hasardeux alors que la légende -très tenace- veut qu’il soit un génie politique.
Après sa défaite à la présidentielle de 2007, où il était arrivé deuxième derrière Abdoulaye Wade, avec près de 15 % des voix, il avait réintégré à la surprise générale le PDS (formation politique de Wade) avant d’en être chassé en 2011. Un chassé-croisé qui explique en partie sa déroute à l’élection présidentielle de 2012 (7%).
Le même scénario se produit avec Macky Sall. Après l’avoir affronté dans les urnes comme principal opposant lors de la présidentielle de 2019, Idrissa Seck intègre le camp présidentiel, un an plus tard. Macky Sall, fidèle à sa philosophie qui consiste à “réduire l’opposition à sa plus simple expression” , l’a fait rentrer dans le rang avec un strapontin au Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE). Pour de bien maigres dividendes, convenons-en.
Après trois ans d’alliance avec Macky Sall, voilà donc Idrissa Seck, guidé par son ambition tenace d’accéder à la Magistrature suprême, en piste pour un nouveau revirement.
On peut aisément prédire qu’une fois de plus ses ruses, stratagèmes, finasseries se solderont par un échec implacable dans les urnes.
Tel est le lot d’Idrissa Seck qui, en noyant, tout idéal, toute fidélité,toute grandeur et toute constance, “dans les eaux glacées du calcul égoïste” (Karl Marx), a progressivement sonné le glas de ses ambitions politiques.