«Cheikh Ahmadou Bamba BA (1852-1927), le guide spirituel des Mourides, pacifique et subversif», par Amadou Bal BA
SENTV : Grand Soufi, saint et érudit, poète et maître de la prosodie en matière coranique, Cheikh Ahmadou Bamba BA, un nationaliste et résistant au colonialisme, a inspiré, après El Hadji Omar TALL et Maba Diakhou BA, mais de façon pacifique, le réveil de l’Islam, à la fin du XIXème siècle. Humaniste, à travers les principes émancipateurs de dignité et de valeur travail, de l’avis unanime de ses contemporains, Cheikh Ahmadou Bamba jouissait de l’estime de tous, y compris parfois des colons. On s’accorde donc à le considérer comme «un saint homme, pieux, charitable, de mœurs très pures, convaincu de la réformation islamique dont il était investi» écrit Paul MARTY dans son rapport sur le Mouridisme.
Authentique et convaincu croyant, Cheikh Ahmadou Bamba ne s’intéressait pas aux affaires de ce monde, et ne recherchait d’autre gloire que celle de la Vérité divine : «Ahmadou Bamba est la meilleure incarnation moderne de la mystique minimiste, de l’Amour et l’imitation du Prophète» écrit Fernand DUMONT. Dans sa vie privée indiquant une discipline familiale et religieuse, teintée d’un ascétisme et d’une grande rectitude, il n’avait que quatre femmes, en accord avec la loi islamique. Dans sa résidence, à Diourbel, son installation est plus que sommaire ; il habitait une case dans laquelle il trouvera la mort. Par ailleurs, il est à la base d’un puissant théocratique agrarien, Cheikh Tidjane SY considérant que le Mouridisme est une réponse à un monde opprimé, celui du Sénégal rural, une sorte de nationalisme africain, une idéologie de l’indépendance, de la culture nationale et de la valeur du développement : «Il ne reste au paysan mouride, à insérer son action, non plus dans le cadre de sa communauté religieuse, mais dans le cadre national, plus nettement, conscience de son rôle d’artisan de la construction d’un Sénégal nouveau» dit le président SENGHOR, le 7 juin 1963, lors de l’inauguration de la Grande mosquée de Touba. «Le cultivateur devient une simple unité productive dans la famille Mouride» écrit Paul MARTY. En fait, Cheikh Ahmadou Bamba est l’initiateur de la sanctification par le travail, une des valeurs à la base du Mouridisme : «Travaille comme si tu ne devais jamais mourir, et prie comme si tu devais mourir demain», telle est sa devise. Le marabout se consacre à la prière et le Talibé travaille : «Le Mouridisme et le Protestantisme sont les deux seules religions qui définissent une telle attitude à l’égard de l’économie» écrit Abdoulaye WADE. «C’est autour du travail, plus exactement de la solidarité qu’il a su créer que la solidarité se réalise et se perpétue chez les Mourides» écrit Cheikh Tidjane SY.
Paul MARTY a tenté de modérer ses éloges en écrivant que Cheikh Ahmadou Bamba aurait ravalé ses ambitions personnelles, parce qu’arrivé trop tard, au moment où le colonialisme est triomphant. En fait, Cheikh Ahmadou Bamba ayantvécu 75 ans, dont 33 ans en privation de liberté, a subi de graves persécutions du colon, vainement. En effet, le colonisateur français croyait, par ses vexations, l’anéantir, mais l’humiliation peut être une source de résistance et d’affirmation de soi. Le règne de l’arbitraire, quand il touche aux choses de l’esprit, n’ayant fait que renforcer la détermination des populations qui ont pris conscience de leur honneur bafoué. En effet, en raison de ses hautes qualités morales, de sa grande probité, sa rigueur, son goût du travail bien fait, Cheikh Ahmadou Bamba a triomphé face aux adversités.
A côté des confréries Tidjane et Qadriyya, le Mouridisme, une création de toute pièce de Bamba, prêche la non-violence. Cette doctrine, «une guerre Sainte aux Ames», suivant «La clef qui ouvre le Paradis et ferme l’Enfer» de Bamba, a été une arme contre le colon par la douceur, la persuasion et l’exemplarité : «Et qui donc, mieux que lui, aurait mieux fait preuve de courage et de caractère, en subissant les pires chocs de la Fortune, sans perdre la foi, ni sa dignité d’homme, et surtout sans haine, sans violence» écrit Fernand DUMONT. En effet, bien avant que le Mahatma GANDHI (1869-1944) n’ait théorisé et pratiqué la non-violence, contrairement à El Hadji Omar TALL (1797-1864) et à Maba Diakhou BA, partisans de la guerre sainte, Cheikh Ahmadou Bamba, en pacifiqueémancipateur, a refusé tout recours à la violence. «Même si le Mahdi descend sur terre, je ne l’aiderai pas. Je ne tuerai ni scorpion, ni serpent ni âme qui vit. Avec la route que j’ai prise (…) si je prends des armes ma mission sera perdue» dit Cheikh Ahmadou Bamba. En effet, comme El Hadji Malick SY (1855-1922), le guide spirituel des Mourides a fait aussi appel au «Jihad du cœur». Tirant les conséquences des guerres saintes passées, Bamba a opté pour une autre voie, en libérant le Sénégal par la voie pacifique, par la foi, le travail et la discipline. Ainsi, Bamba inaugure, avant l’heure, une forme de désobéissance civile, à la Mahatma GANDHI (1869-1944). «Par sa vie exemplaire et par son œuvre écrite édifiante, Cheikh Ahmadou Bamba nous a démontré une chose d’une importance vitale pour notre temps que la non-violence n’est pas incompatible avec l’Islam, mais qu’elle en constitue l’essence première ainsi que son expression la plus parfaite, à l’opposé des fanatismes qui tendent à réduire toute religion à un simple outil temporel, voir uniquement politique» écrivent Didier HAMONEAU et El Hadji Alioune M’BACKE. En raison du charisme de Cheikh Bamba, les fidèles ne suivant que ses recommandations, les chefs de canton se plaignirent de n’être plus obéis, ni écoutés par les Mourides, et une partie de la population refusa de payer l’impôt. «Le groupement dans une seule main de plusieurs milliers d’hommes entièrement soumis à leur Cheikh local et au Serigne suprême, et qui, sur un mot d’ordre de ce chef, pourraient troubler très gravement la tranquillité publique, aboutirait à l’anarchie publique» estime le colonisateur.
Le Mouride signifie «l’aspirant», le «postulant», en somme le «Talibé» désirant être uni à Dieu, est un corps de prescriptions morales, religieuses et culturelles. Par extension, les Mourides sont les adeptes de la confrérie de Cheikh Ahmadou Bamba. On appelle Cheikh Bamba soit «Serigne Touba» (le Marabout de Touba) soit «Khadimoul Rassoul» (le Serviteur du Prophète). Par conséquent, le Mouridisme reposant tout entier sur la personne d’Ahmadou Bamba, par sa sainteté, par sa science et ses valeurs morales, continue de drainer des foules à Touba, notamment lors du Grand Magal, célébrant l’exil au Gabon. Dès le début, le colonisateur s’est méfié du Mouridisme qu’il a persisté à baptiser comme une «secte». «Nous ne devons négliger aucune occasion de combattre un prosélytisme ardent, hostile à notre influence, et en général, à la domination européenne» écrit le gouverneur de l’A.O.F. dans son rapport de 1911.
Il existe une importante documentation orale et écrite, en arabe, en français et en anglais, sur la vie et l’œuvre de Cheikh Ahmadou Bamba. Grand érudit, certains de ses ouvrages en arabe, sont accessibles en langue française : «Il faudrait toute une vie pour évaluer les écrits du fondateur du Mouridisme qui a semblé passer toute son existence à taquiner les Muses» écrit Amar SAMB. «Chacun s’accorde à reconnaître que pour un Noir, il est remarquablement instruit en Arabe et a des connaissances surprenantes sur les œuvres des auteurs arabes, pour un indigène du Sénégal qui n’est pour ainsi dire pas sorti de son pays» écrit le 22 octobre 1915, A LASSELVES, administrateur de Diourbel. Les disciples de Bamba ont produit des contributions laudatrices ou dithyrambiques, manquant ainsi de distance critique ou des stéréotypes. Ainsi, certaines sources orales attribuent à Bamba de nombreux miracles. On dit que lors de ses exils, Amadou Bamba pria sur les eaux alors que les colons voulaient l’empêcher de s’exécuter sur le navire qui le menait au Gabon ; il réussit également à endormir un lion, que les colons avaient envoyé dans sa cellule à Saint-Louis, en lui récitant des prières. Le témoignage d’un militaire français est, cependant, troublant : «Au cours d’une nouvelle visite à Cheikh Bamba, il me fut donné l’occasion d’éprouver la valeur de son gris-gris. A mon retour au poste (militaire), je fus accueilli par une vive fusillade de deux goumiers révoltés. Bien que les énergumènes m’aient envoyé une centaine de balles à 30 mètres de distance, pas une ne nous toucha» écrit Eugène DEVAUX dans les «Annales Coloniales» du 20 octobre 1927. Il est difficile d’ignorer totalement la tradition orale, mais celle-ci est faite souvent d’exagération et de fanatisme, de nature à faire douter de sa fiabilité. En conséquence, je privilégierai donc les écrits de Cheikh Ahmadou Bamba qui, en homme humble, a refusé toute forme d’idolâtrie de sa personne. Oumar BA, un archiviste, a publié un important ouvrage collectif sur Bamba, fouillé, rigoureux et documenté. Le rapport sur le Mouridisme, publié en 1913, de Paul MARTY, Chargé du Service des Affaires musulmanes, est un document de référence que les chercheurs pompent sans le citer. Comme très souvent, les écrits des coloniaux, à défaut de minimiser l’action de Cheikh Ahmadou Bamba, recèlent parfois de graves erreurs, des calomnies ou même des injures : «Il a enthousiasmé des foules ferventes qui lui ont rendu un véritable culte ; mais il a été dénoncé comme un charlatan grossier, voire un malfaiteur. On lui a reproché son entêtement doctrinaire, mais des hommes de science et de mérite ont mis entre ses mains les intérêts de leur vie terrestre et future. En réalité, c’est un vrai toucouleur : obstiné, avare, bonasse, du reste nullement dépourvu d’intelligence, ni même de finesse» écrit Alphonse GOUILLY dans son «Islam en AOF». Paul MARTY, même s’il est plus équilibré, considère Bamba comme un «Illuminé», d’un «mysticisme vague», le Mouridisme, serait une secte «sortie de l’Islam», «d’hérésie» et «l’ardeur des illettrés, l’extravagance des néophytes et la mentalité des Noirs» ayant fait le reste : «La seule chose qui soit vraiment à déplorer du Mouridisme, vue du côté économique, c’est l’exploitation des indigènes» écrit Paul MARTY. En réalité, les dons que recevait Bamba sont redistribués aux nécessiteux.
Le colonisateur a fini par réaliser, mais tardivement, que les mesures de restrictions de la liberté de Cheikh Bamba sont contreproductives pour l’économie arachidière. Il fallait un compromis entre le politique et le religieux. A partir de l’installation de Cheikh Bamba à Diourbel, en 1913, les relations avec le colon se sont progressivement apaisées «L’administration coloniale venait de comprendre qu’Ahmadou Bamba n’était nullement engagé dans une épreuve de force contre elle, mais aussi, elle était consciente des avantages qu’elle pouvait tirer d’une collaboration politique» écrit Djibril SENE. Le colonisateur a fini par reconnaître les qualités morales, intellectuelles et religieuses de Cheikh Ahmadou Bamba, les circulaires des 22 septembre 1909 et 26 décembre 1911 énoncent la liberté du culte pour les Mourides, sous réserve de s’abstenir d’un prosélytisme à l’égard des autres groupes ethniques, ils restent sous une surveillance étroite. Bamba est élevé, en janvier 1919, au rang de Chevalier de la Légion d’Honneur «Dans le domaine religieux, je crois qu’Amadou Bamba est «un convaincu». Elevé dans un milieu familial où la cuture est de tradition, il est très versé dans les lettres et sciences musulmanes. Ces études ont eu, pour résultat, de l’affermir dans sa foi, en le nourrissant de preuves de la Vérité et de l’Islam» écrit Paul MARTY. Bamba, qui n’a pas été consulté pour cette distinction, a manifesté sa volonté de recevoir le diplôme et non pas la croix, un insigne caractéristique de la religion chrétienne. En novembre 1925, l’autorisation de construire la grande mosquée de Touba lui est accordée, qui ne sera inaugurée qu’en 1963. Une nouvelle grande mosquée a été inaugurée le jeudi 26 septembre 2019, à la commune de Colobane, à Dakar, «Massilikul Jinaan» (les itinéraires du Paradis), en référence à un ouvrage de Bamba sur le Soufisme.
La recherche concernant Cheikh Ahmadou Bamba, et notamment son héritage, est toujours passionnée, ne laissant jamais indifférent. A certains égards, les héritiers de Cheikh Ahmadou Bamba ont entretenu la flamme (Grandes mosquées de Touba et de Dakar, Magal de Touba, Touba est devenu une grande nécropole, ferveur religieuse, discipline et attachement aux enseignements de Bamba), mais à d’autres égards, ils ont perverti, voire trahi, le message du Saint Homme, à travers un affairisme et une politisation de son œuvre qui fait désormais partie du patrimoine culturel du Sénégal. En définitive, Cheikh Ahmadou Bamba est un vrai Saint, un nationaliste irréductible, mais l’héritage est contrasté.
I – Cheikh Ahmadou Bamba, un nationaliste irréductible
A – Cheikh Ahmadou Bamba est un Soufi nationaliste
Cheikh Ahmadou Bamba est un nationaliste, son opposition politique à la domination coloniale prit alors une coloration religieuse. «Le captif de Dieu et ne reconnaissait d’autre maître que lui et ne rendait hommage qu’à lui seul» écrit Bamba. En effet si toute obéissance va à Dieu, et ne peut aller qu’à lui, car lui seul a droit de commandement sur terre, Bamba en conclut «qu’il n’est d’autre autorité que celle de Dieu. Et s’il faut obéir à ceux qui détiennent le commandement on doit toujours ajouter que c’est à condition que l’ordre soit en parfaite conformité avec la loi coranique». Dès lors comment obéir à des autorités coloniales dont la légitimité ne repose que sur la force brutale alors que fondamentalement l’islam rejette ce qui s’appuie sur le despotisme. Tous ceux qui étaient en quête d’absolu ou refusaient de s’accommoder de la situation coloniale choisirent Bamba comme maître spirituel. On y trouvait des marabouts, d’anciens guerriers Tieddos au chômage du fait de la conquête, des chefs destitués, des esclaves en rupture de ban, des anciens cadres de la société traditionnelle, bref la plupart des individus que l’ordre colonial avait plongés dans une profonde détresse. La présence de ces mécontents dans le mouvement donna à la confrérie mouride l’aspect d’un abri où se réfugièrent tous les ennemis de l’administration coloniale. C’est eux, anciens cadres de la société traditionnelle, qui infléchirent le mouvement dans cette direction au point de rendre possible l’équation selon laquelle l’appartenance à la confrérie impliquait l’hostilité à la France.
Cheikh Ahmadou Bamba aura refusé tout compromission ou toute compromission avec le colon, son Mouridisme, un mouvement religieux, est également une opposition nationale. En effet, avant lui, ce sont les Peuls qui sont à la base de l’Islamisation du Sénégal, d’abord par le contact avec les caravanes des Touaregs, puis avec la retentissante Révolution des Almamy du Fouta-Toro, sous l’égide de Thierno Sileymane BAL (1720-1776), ensuite, il y aura eu El Hadji Omar TALL (1794-1864) et Maba Diakhou BA (1809-1867). Ils ont fait émerger les notions d’égalité, de fraternité, de justice, de fierté, de dignité et de probité dans la société sénégalaise. Abdoul Bocar KANE qui avait accordé l’asile à Alboury N’DIAYE, le Bourba du Djolof, verra le Fouta-Toro, qui avait opposé la plus grande résistance, démantelé par le colon. Les puissants royaumes du Sine et du Saloum, ainsi que celui du Cayor sont marqués par des pratiques esclavagistes ou animistes. En raison de leur proximité des côtes, leur contact avec les Européens a corrompu les mœurs, notamment l’usage des alcools forts et la corruption. La communauté Ouolof n’ayant jamais eu de Marabout de grand renom, Cheikh Ahmadou Bamba émerge, après les défaites des marabouts peuls jihadistes, la dislocation progressive des anciens royaumes. Le colonisateur, avec sa machine de guerre, la prétendue supériorité de sa culture et sa religion chrétienne, semblait triomphant, mais le peuple sénégalais recherchait un leader charismatique, un refuge le guidant sur le chemin de la dignité et de la gloire d’antan. «Il fut un temps favorable, après 1886, où la disparition des chefs politiques du Sénégal d’antan laissait la place libre à des hommes nouveaux, où le prestige des royautés et des aristocraties qui succombaient sous les coups de la puissance française, était éclipsé par la force et la vérité de l’Islam croissant, par la vertu et la sainteté des marabouts, ses représentants. Amadou Bamba a cru, ce jour-là, et il en est longtemps persuadé, qu’il était appelé à restaurer, à son profit, l’autorité locale» écrit Paul MARTY, soulignant ainsi toute la méfiance des colons. Aussi, l’ascension de Cheikh Ahmadou Bamba, bien que pacifique, a été suivie, de la part du colonisateur avec une grande appréhension, une méfiance, voire une hostilité. Certains colons extrémistes pensaient que Cheikh Ahmadou Bamba pourrait mener une guerre sainte pour «jeter les Français à la mer». Cependant, les colons estiment que même si Bamba est pacifique, il ne serait pas sans danger «Le regroupement, dans une seule main, de plusieurs milliers d’hommes, qui paraissent entièrement soumis à leur chef, et au Serigne, et qui, sur un mot d’ordre de ce chef, pourraient très gravement nuire à la tranquillité générale. C’est le péril de l’anarchisme mystique ou religieux, aboutissant à l’anarchie publique»écrit Paul MARTY.
Cheikh Ahmadou Bamba M’BACKE a su déterminer une nouvelle vision, aux yeux de ses contemporains, en formulant d’une façon très claire des idées novatrices capables de soulever les foules. Pour Bamba, le temporel ne saurait ruiner le spirituel, et donc le pouvoir colonial qui recherche l’évangélisation des Sénégalais, finira par être vaincu. Le Mouridisme, contrairement à ce que le colonisateur décrit comme «une secte», est une école de spiritualité, une conquête des âmes, un viatique pour la liberté, un chemin pour la richesse de la culture africaine. Considéré comme un Saint par ses talibés, et d’une grande sobriété, pour Bamba, Dieu doit être la seule préoccupation. Aussi, la grande dévotion et le fanatisme des Mourides à l’égard de leur guide spirituel est légendaire : «Il s’entoure d’un rigoureux protocole. Il fait réciter journellement plusieurs fois le Coran et de nombreuses formalités précèdent les prières : c’est le seul moment où Amadou soit visible. Les audiences privées constituent les rares faveurs, et quand, par hasard, il parle, c’est toujours an nom d’Allah. Il donne sa bénédiction en crachant sur la tête et les mains de ses adorateurs prosternés. L’eau de ses ablutions est précieusement recueillie, et le sable qui en absorbe les éclaboussures sert d’amulettes revendues par les talibés», écrit le 27 septembre 1907, l’administrateur de Louga.
Cheikh Ahmadou Bamba est un soufi qui appelait à la rénovation des valeurs morales, seule susceptible de régénérer la société sénégalaise. «Le Soufisme dans le fait de n’avoir que Dieu comme unique préoccupation et de considérer comme absolument inutile tout ce qui n’est Lui», disent les tenants de cette doctrine. La vie terrestre, «le Bas-monde», est illusoire, ce serait de la folie que de s’y accrocher : «Il y a ce monde vil qui n’a aucune valeur, qui est méprisable. Il faut s’en laver les mains pour acquérir la qualité du détachement du cœur qui purifie tes adorations. N’éprouve ni joie, ni chagrin pour l’obtention ou la perte d’un bien mondain. La passion de ce bas monde est la cause ou, du moins, le fondement de tout péril» écrit Cheikh Ahmadou Bamba, dans son traité sur le Soufisme, «Les itinéraires du Paradis». Pour être Soufi, il faut donc avoir une bonne connaissance de la théologie et l’enseigner à ses disciples. «Je n’ai jamais de toute ma vie accompli un acte dont mon discipline puisse avoir honte, aussi n’aimerais-je pas que mes disciples se comportent d’une façon qui me fasse honte» dit-il «Evitez l’autosatisfaction et la vanité», ajoute Bamba. Cheikh Ahmadou Bamba est un Saint reconnu de tous avec une dimension mystique amplifiée par la tradition orale. «Ahmadou Bamba ayant posé les bases, ses disciples immédiats, les Cheikhs consacrés par lui, les ont développés avec l’ardeur et l’extravagance des néophytes ; la mentalité noire a fait le reste» écrit dédaigneusement Paul MARTY (administrateur colonial, 1882-1938). Mais cette doctrine n’est pas accessible au néophyte ; le guide spirituel est un intercesseur pour les disciples : «Celui qui s’enfonce dans les jungles du Soufisme, sans la compagnie d’un Maître spirituel, s’enfonce, à coût sûr, dans les profondeurs du péril et n’y tirera jamais du profit» dit Bamba, exigeant ainsi une fidélité, sans failles, à ses talibés. «Ce qu’on appelle, communément, le Mouridisme, est l’ensemble du phénome de l’attirance des populations vers un guide religieux, et de l’acquisition, par ces populations, d’un système de rites d’entrainement spirituel, et de prescriptions particulières, édictées, précisément, pour donner de la cohésion à ce rassemblement de populations» écrit Fernand DUMONT. Par conséquent, la pensée de Cheikh Ahmadou est un savant dosage entre l’ascétisme, le mysticisme et l’action vers Dieu : «Ces Noirs, teintés de mahométisme, retournent à leurs antiques croyances, à l’adoration d’un homme, l’homme fétiche, au culte des Saints» écrit Paul MARTY, assimilant ainsi le Mouridisme à l’animisme. Loin d’être un agitateur, au sens politicien du terme, il n’avait pas les ambitions que lui prêtait le colonisateur. Cheikh Ahmadou Bamba n’était l’ami ou l’ennemi de personne. Il n’était que l’ennemi de ceux qui se détournaient de la Vérité, même s’il s’agissait de Sénégalais. Se détournant, avec intransigeance de toutes les jouissances terrestres, le désintéressement, le but ultime de sa vie était l’adoration de Dieu, et être au service du Prophète : «Le bonheur consiste dans l’oubli de l’existence» dit Sidy Abdel-Kader, un maître à penser de Bamba.
B – Cheikh Ahmadou Bamba est un Peul de culture Ouolof
De son patronyme BA, comme les Peulhs Dényankobé, les ascendants de Cheikh Ahmadou Bamba sont des Foutankais, même s’il est lui-même de culture Ouolof. Cheikh Ahmadou Bamba, en raison de ses origines peules, a un lien de parenté avec El Hadji Malick SY et El Hadji Omar Foutiyou TALL. «La tradition conserve le souvenir d’une lointaine ascendance : à la quatrième génération, l’aïeul portait le nom d’honneur de BA qui dénote des origines de Peuls noirs. Bien entendu ce fut un Toucouleur Wolofisé, fixé, marié, naturalisé en pays Ouolof» dit Vincent MONTEIL. «Le quatrième ascendant d’Ahmadou Bamba était un Toucouleur et originaire du Fouta. C’est lui le premier qui vient s’établir en pays Ouolof, s’y maria avec une femme du pays et adopta les mœurs et usages du pays» écrit Paul MARTY, un contemporain de Cheikh Ahmadou Bamba. Sa mère, Mariame Diarra Bousso LY (1833-1866), une peule originaire de Golléré, dans le département de Podor, est décédée à Porokane, dans le Nioro du Rip, dans la région de Kaolack, dans le fief de Maba Diakhou BA. D’une piété incommensurable, surnommée «Jâratu-I-Lah», la «Voisine de Dieu», les Mourides lui vouent un grand culte : «Celui qui, ayant acquis le savoir, ne s’emploie pas à conformer ses comportements et conduites à ses connaissances, est comparable à un âne qui ploie sous le faix d’un lourd chargement de livres savants et qui, bien entendu, ne saurait profiter de tant de sciences» écrit Bamba. Aussi, un pèlerinage annuel des Mourides est dédié à Diarra Bousso LY. Ce sont des marabouts Toucouleurs, issus de la famille de sa mère, qui ont donné une éducation religieuse à Cheikh Ahmadou : Mohamadou Bousso et Samba KA. Cheikh Bamba a eu également une grande proximité avec Cheikh Sidya, un marabout mauritanien.
Le patronyme «M’Backé» est, en fait, tiré du nom village fondé par ses ancêtres dans le Baol en 1802, dans une parcelle de terre donnée à Maharam, par le 2ème Damel du Cayor, Amary N’Goné Sobel FALL. Le grand-père de Cheikh Ahmadou Bamba, Balla M’Backé, fonda à la fin du XVIIIème siècle le village de M’Backé. C’est là que naquit son fils, Momar Anta Saly qui fit ses études avec un grand marabout nommé Ahmadou Bamba. C’est pour cela que Momar donna le nom d’Ahmadou Bamba, à son deuxième fils né vers 1852, qui deviendra le guide des Mourides ; Oumar BA, archiviste et Serigne Sam M’BAYE, traducteur des «Itinéraires du Paradis», situent sa naissance en 1855. Ahmadou Bamba porte le prénom d’un ami de son père, Amadou SALL, un marabout peul qui aurait instruit Momar Anta Sally. Par conséquent, Bamba est né sous Auguste Léopold PROTET, gouverneur du Sénégal de 1850 à 1854. Le jeune Bamba, pétri de pudeur, de chasteté et piété familiale, est d’abord confié à son oncle Mouhamadou BOUSSO et à Samba Toucouleur KA, pour son initiation au Coran. Tafsir M’Backé reprendra, par la suite, le relais. Dans ce monde peul de son enfance, Bamba est constamment en lutte contre les vices comme la jalousie, l’orgueil, l’avidité et l’égoïsme, il prêchait, par la parole et les actes, l’humilité, l’esprit de sacrifice, la solidarité, la générosité et le dépassement de soi.
Grand humaniste, animé d’une grande compassion, Cheikh Ahmadou Bamba recherchait en permanence, dans son combat contre le colon, tout ce qui élevait la dignité de l’homme sénégalais. Il «était brave, mais il ne précipitait rien sur un excès de colère ou fanatisme, et ne s’enorgueillissait pas. Loin de l’abaissement et de l’avilissement, il ignorait la peur, la frayeur et la petitesse d’âme» écrit Serigne M’Backé Bassirou, un de ses biographes.
Au cours des invasions de Maba Diakhou BA (1809-1867), un disciple de El Hadji Omar TALL, la région du Baol fut dévastée, le grand-père, Balla M’Backé fut tué et son père Momar Anta Saly fut déporté au Saloum, à Prokhane. Momar Anta Saly, pour assurer sa survie, donne des enseignements coraniques et devient le percepteur des enfants de Maba Diakhou BA, dont Saër Maty, et assure les fonctions de Cadi. C’est là, vers 1865 que le jeune Ahmadou Bamba fit la connaissance du Damel du Cayor, Lat-Dior, qui maria sa sœur Thioro DIOP à Momar Anta Saly. Dans son Jihad, Maba Diakhou avait accueilli Lat-Dior DIOP, l’a converti à l’Islam en 1864, et a refusé de le remettre aux autorités coloniales. Mais avec la duplicité du Bour du Sine, Coumba N’Doffène DIOUF, Maba Diakkou fut tué à Somb, le 18 juillet 1867. N’ayant plus de protecteur, Lat-Dior avec sa soumission au colonisateur fut réintégré comme Damel du Cayor en 1871 et la famille de Cheikh Ahmadou le suivi. Le père Bamba devait mourir dans le Cayor en 1882, à M’Backé Cayor. Bamba refusa le poste de Cadi c’est-à-dire chef du service judiciaire du Cayor en disant : «j’ai honte que les anges me voient porter mes pas auprès d’un roi autre qu’Allah». En effet, Cheikh Bamba refusant de se placer sous la protection de Lat-Dior : «Ils m’ont dit réfugies-toi auprès des Sultans tu auras des cadeaux enrichissants en permanence ; j’ai dit : «Je me réfugie auprès de mon Seigneur, me suffis de Lui et ne me satisfais que du savoir et de la religion» dit-il. Cette conduite irréprochable vis-à-vis des détenteurs du pouvoir temporel lui attira l’affection de beaucoup d’éléments de la population.
Samba Laobé FALL et Lat-Dior DIOP seront vaincus définitivement par le colonisateur en octobre 1886 et le Cayor démembré ; ce qui oblige Ahmadou Bamba à revenir s’installer à M’Backé dans le Baol, un village fondé par son grand-père. Ahmadou Bamba va lui-même ériger un nouveau village du nom de Touba. Mais à cette époque, le Baol est une province livrée à l’anarchie et au désordre, en raison de son chef, Thieyacine FALL. Les chefs du parti Tiéddo furent mis à mort ; Tanor Gogne DIENG, un ami et protecteur de Cheikh Ahmadou Bamba, devient le Tègne du Baol de 1890 à 1894. Cheikh Ahmadou Bamba entretient toujours des relations cordiales, avec Saër Maty, le fils de Maba Diakhou BA, qui voulait continuer la guerre sainte de son père, avec l’appui des Anglais, installés en Gambie. A partir de fin 1888, le colonisateur commence à s’inquiéter des activités de Cheikh Ahmadou et le surveille de très près. «L’installation de Serigne à distance égale des deux fleuves Sénégal et Gambie, pouvait devenir, très facilement, le centre d’un groupement hostile à notre influence» écrit Paul MARTRY, dans son rapport. Le gouverneur, Clément THOMAS, en 1889, demande à Bamba, de «prêcher le calme à ses adeptes». En effet, Bamba a créée sa voie du Mouridisme «Quiconque m’accompagne pour la seule et simple raison de s’instruire, peut désormais chercher ailleurs, mais quiconque partage mon ambition et ma volonté peut me suivre dans la nouvelle Voie que j’ai tracée».
C – Cheikh Ahmadou Bamba a organisé une résistance passive
En 1895, avec la mort du Tègne du Baol, Tanor DIENG, la dislocation de cette province désormais sous administration directe du colonisateur, Alboury N’DIAYE, le Bourba du Djolof étant malade, faible et déconsidéré, Cheikh Ahmadou Bamba fonda un nouveau village, dans le canton de Bakkal, dans le Djolof, avec 500 de ses talibés qu’il appela Touba (Djolof). Aussitôt, ses anciens amis, les soldats de Lat-Dior et du Bourba Alboury, les déserteurs, les chefs révoqués, les Peulhs fanatisés affluent auprès de Bamba. En mai 1895, Samba Laobé FALL, le Damel du Cayor, déclare sa conversion au mouridisme. Les populations rechignent à payer l’impôt au colonisateur français. Cheikh Ahmadou, qui s’est rapproché des Tidjanes, censés être des Jihadistes, comme Maba Diakhou, Bamba est arrêté le 10 août 1895. Condamné à l’internement politique par décision du 5 septembre 1895, Cheikh Ahmadou Bamba fut déporté de 1895 à 1902, à la forêt inhospitalière de Mayumba, au Gabon. «Si l’on n’a pas pu relever contre Amadou Bamba aucun fait de prédication de guerre sainte bien évident, son attitude, ses agissements, surtout ceux de ses principaux élèves sont de tous points suspects» dit le Conseil privé qui «après avoir entendu la lecture des rapports de Messieurs Merlin et Leclerc et fait comparaitre Ahmadou Bamba a été d’avis, à l’unanimité, qu’il y avait lieu de l’interner au Gabon, jusqu’à ce que l’agitation causée par ses enseignements soit oubliée au Sénégal», séance du 5 septembre 1895. Le Directeur des Affaires politiques considère que l’ambition d’Amadou Bamba était de devenir, par personne interposée, le véritable chef du Baol, puis du Djolof. «Ahmadou Bamba nous a échappés en 1892 en protestant de ses bonnes intentions mais en réalité comme tous les chefs musulmans c’est un djihadiste et cette fois-ci il ne faut pas qu’il nous échappe, il faut qu’on s’empare de lui et qu’on règle son problème définitivement» dit LECLERC. Lors de ce procès, Cheikh Ahmadou Bamba fit une prière de deux rakkas dans le bureau du Gouverneur avant d’adresser la parole au Conseil pour lui signifier sa ferme intention de ne se soumettre qu’à Dieu. Par cette prière symbolique et cette prise de position téméraire devant le colonisateur, Cheikh Ahmadou Bamba venait de commencer sa résistance passive.
Cheikh Ahmadou Bamba voit dans son exil, une volonté de Dieu en vue de réaliser une mission qui lui est assignée : «Le motif de mon départ (en exil), est la volonté que Allah a eu d’élever mon rang et de faire de moi l’intercesseur des miens et le Serviteur du Prophète». Le colonisateur pensait, avec l’éloignement de Cheikh Ahmadou Bamba, son influence sur les populations allait disparaître. Cheikh Ahmadou Bamba embarqua pour le Gabon le samedi 21 septembre 1895 à bord du paquebot «Ville de Pernambouc» sur lequel il aura à affronter d’autres épreuves dont : l’hostilité affichée de l’équipage, la ruée d’un taureau déchaîné vers sa sainte personne et dont il fut miraculeusement préservé. Il sera contraint, suivant la tradition orale, de faire la prière sur la mer. «Ils m’ont jeté sur la mer par refus de la volonté divine et par haine, Le Généreux m’y a incontestablement comblé de grâce. Ils ont voulu m’humilier en me jetant sur la mer, heureusement que mon Seigneur a dompté pour moi la houleuse des mers» écrit Cheikh Ahmadou Bamba, dans son autobiographie.
Durant son exil au Gabon, Cheikh Ahmadou Bamba a rencontré de nombreuses personnalités dont Blaise DIAGNE (1872-1934), alors fonctionnaire des douanes. Blaise DIAGNE lui demande de prier afin que l’homme noir puisse recouvrer, un jour, sa liberté et sa dignité. Bamba s’investira dans la campagne victorieuse de 1914 de Blaise DIAGNE ; c’est la première fois qu’un Africain noir est élu député du Sénégal à l’Assemblée nationale française. Son frère et disciple Mame Cheikh Anta M’Backé a entrepris un périlleux voyage au Gabon pour lui rendre visite. Cheikh Ahmadou Bamba a entretenu une importante correspondance avec le résistant guinéen, Samory TOURE (1830-1902), déporté également à Noja au Gabon de 1899 au 2 juin 1900, date de sa mort. Lorsqu’il apprit la nouvelle, Cheikh Ahmadou Bamba effectua la prière des morts à son intention depuis Lambaréné. Il retrouva l’ex-Bourba du Djolof qui l’avait soutenu, Samba Laobé Peinda N’DIAYE, exilé au Gabon pour 5 mois. La décision d’exil de Cheikh Ahmadou Bamba était censée définitive et perpétuelle, mais plusieurs faits joueront en sa faveur. Ainsi, Cheikh Sidia est intervenu en sa faveur auprès du colon. Cheikh Ibrahima FALL (1855-1930) réussit à convaincre le député du Sénégal, François CARPOT (1862-1936, député du Sénégal de 1902 à 1914) de l’innocence de Cheikh Ahmadou Bamba. Celui-ci s’engagea à réhabiliter Cheikh Bamba après son élection. Il est vrai aussi que depuis le départ de Bamba, avec la révolte des talibés, la production arachidière avait drastiquement baissé ; ce qui mettait en péril les affaires de la bourgeoisie saint-louisienne. L’exil de Bamba a eu un effet non escompté pour les colons, à son retour en novembre 1902 au Sénégal, il est auréolé de grâce et de sainteté, les talibés accourent de partout, des dons énormes lui sont versés. En mai 1903, convoqué respectivement par le commandant du cercle de Thiès et par le gouverneur à Saint-Louis, Cheikh Ahmadou Bamba refusa d’y déférer : «Je vous fais savoir que je suis le captif de Dieu, et ne reconnaît pas d’autres autorités que lui» dit-il aux colons.
Sur instigation de l’administrateur, Allys, et avec la complicité du Bour Sine, Cheikh Ahmadou Bamba BA est arrêté à nouveau le 13 juin 1903 et déporté en Mauritanie dans l’une des Zaouia de Cheikh Sidya, un de ses amis, à Souet El Ma. Cependant, les talibés continuèrent de le suivre, même en Mauritanie et veulent organiser une violente révolte. Cheikh Ahmadou Bamba s’y oppose en ces termes : «Je n’espère le soutien d’aucun ami, ni ne crains l’agression d’un ennemi, je me suis entièrement soumis à Dieu». En avril 1907, le Commissaire du gouvernement général en Mauritanie, ayant fait remarquer l’attitude correcte de Bamba depuis 4 ans et sa conduite irréprochable, demanda et obtint son retour au Sénégal. En avril 1907, Bamba est assigné à résidence à Thiéyène (Diolof, Louga). Un domaine de 4 km2 lui est concédé, pour son installation, celle de sa famille et leur culture. Mais cet endroit isolé échappe en fait à la surveillance du colonisateur et les visites des talibés ainsi que leurs dons n’ont fait que doubler. C’est pour cela que le colonisateur fixa une nouvelle résidence à Diourbel à partir du 16 janvier 1912. Sur son chemin les talibés scandaient «Notre Allah revient». A Diourbel, Bamba est soumis au départ à un régime sévère : «Amadou Bamba paraît avoir renoncé à retourner dans son village, M’Backé. La surveillance étroite à laquelle il était soumis était, dans la réalité peu efficace, mais avait, par contre, des côtés vexatoires qui, joint au caractère provisoire des paillotes qu’il habitait» note le rapport général du gouverneur de 1913. Les conditions de surveillance ont été par la suite assouplies : «Un libre accès auprès de lui a été accordé à tous ; notre surveillance s’est faite discrète ; ce qui ne l’empêche pas de s’exercer. En même temps, un vaste emplacement limitrophe de l’escale de Diourbel a été affecté au Serigne. Il s’y est fait construire une maison en pierres». Contrairement à ses héritiers, Cheikh Ahmadou Bamba a toujours refusé le luxe et le superflu. Ainsi, il ne demandait qu’une chose au gouverneur : des terrains et des habitations pour ses cultures ; il n’avait pas besoin, en ce bas monde, de larges emplacements, non essentiels.
II – Cheikh Ahmadou Bamba, une autorité spirituelle
A – La morale et la doctrine de Bamba : une rénovation de l’Islam
1 – Le Jihad du cœur, la guerre sainte aux âmes
Cheikh Ahmadou Bamba a écrit une vingtaine d’ouvrages dont certains ont été traduits en langue française, dont la «Barque de la confiance», «Les clés qui ferment l’Enfer et ouvrent le Paradis», «Les Jardins des Vertus», ainsi que des poèmes à la gloire de Dieu et des louanges au Prophète Mohamed. Il recommande les prières nocturnes, de fuir les réunions des gens négligents et d’adorer, sans limites, Dieu. «Je n’ai pas été plus particulièrement frappé par le fanatisme dont vous estimez que sont empreints les écrits attribués à Amadou Bamba. Ils ne m’ont pas paru présenter un caractère d’hostilité plus marqué que la plupart des écrits de ce genre. Le vocabulaire imagé et symbolique et toujours abscons, dont se servent, avec une recherche laborieusement étudiée, les musulmans engagés dans une Voie, doit, sans doute, retenir notre attention, mais je ne pense pas qu’il faille en exagérer la portée» écrit William PONTY le 8 novembre 1912. En fait, «tous s’accordent à le considérer comme un saint homme, pieux, charitable, de mœurs très pures, convaincu de la mission de réformation islamique dont il est investi» écrit Paul MARTY.
Cheikh Ahmadou Bamba a exposé sa morale, en particulier, dans son ouvrage «Les verrous de l’enfer et les clés du paradis» : «Apprends à prier pour plaire à Dieu ; apprends à prier sans le faire avec ostentation. Celui qui garde pour lui tout seul ses biens et ne fait pas charité aux pauvres, celui-là sera malheureux avant sa mort. Il faut faire la guerre sainte aux âmes» ou encore dit-il «Et que tout homme sensé ou sot sache que quiconque se rebelle contre la Vérité, est un maudit». Pour les qualités intellectuelles et morales, Bamba recommande la pudeur, le scrupule et la générosité, et prohibe le mensonge, la médisance, la calomnie, l’orgueil, la cupidité, l’ostentation, l’amour du renom, la haine, la jalousie et la précellence. Bamba condamne la sécheresse des cœurs et la corruption des esprits. Il consacre des thèmes sur le savoir afin d’obtenir le salut par la droiture, et les objectifs de la connaissance sont de sortir de l’ignorance et d’être utile aux autres. Il faut respecter, servir et honorer son maître. Bamba recommande d’abandonner les choses vaines et insignifiantes et de «s’adonner, continuellement, à la contemplation de Dieu, car cela mène à une fin heureuse».
Dans son «Viatique à la jeunesse» Bamba exhorte la jeunesse de se hâter vers la recherche du savoir et de combattre ses âmes charnelles. Dans les «Itinéraires du Paradis», Bamba revient sur les défauts graves que sont l’orgueil, la fierté, la méchanceté, la pleurnicherie, la passion pour ce bas monde, le mauvais caractère et le défaut d’impatience. A ceux qui sont tentés par la violence, Bamba est très clair : «il est interdit de l’écrire, de l’écouter quand on en parle, notamment de la pratiquer, ainsi que de verser le sang ou d’utiliser illégitimement le bien d’un musulman ou d’un semblable». Il incite de «fréquenter les gens du Bien en suivant leur exemple».
Cheikh Moussa CAMARA (1864-1945), El Hadji Malick SY (1855-1922) ainsi que Seydina Limamou Laye THIAW (1843-1909) rejettent le recours à la violence et prônent, comme Ahmadou Bamba, le Jihad du cœur. Cependant, contrairement au guide spirituel des Mourides, El Hadji Malick SY prêchait la collaboration avec le colonisateur : «Les Français se sont imposés à nous par leurs bienfaits de justice, la sécurité intérieure, la paix générale, le développement des transactions et du bien-être, et le respect de notre religion» dit El Hadji Malick. Conquis par ses talents d’éducateur et sa probité, Alboury N’DIAYE, le roi du Djolof, invite Bamba à prendre les armes contre le colonisateur français. «Je ne suis pas venu sur terre pour verser le sang de mes semblables. Je suis le serviteur du Prophète (Paix soit sur lui), le vivificateur de son enseignement et le libérateur des Hommes. J’extirperai la haine des cœurs et j’affranchirai mon peuple des chaînes de l’esclavage, des tentations de Satan et des futilités de ce bas monde. Chaque homme sera le frère de l’autre et le culte ne sera rendu qu’à Dieu» répond Cheikh Ahmadou Bamba.
Cette doctrine du Jihad du cœur de Cheikh Ahmadou Bamba, nous interpelle plus que jamais à notre époque. En effet, Felwin SARR, un professeur à l’université Gaston Berger de Saint-Louis, a eu raison, dans son ouvrage «Dahij», de rappeler ce que signifie réellement le Jihad au XXIème siècle : «Ce livre est un Jihad. Une guerre intérieure. Un Jihad pour sortir de moi-même, de ma race, de mon sexe, de ma religion, de mes déterminations. Un Jihad pour aller vers moi-même. C’est un désir de naissance, donc de mort». M. SARR précise encore sa pensée, le Jihad est : «maîtrise de soi», «effort intense. Endurer l’exigence vis-à-vis de soi à chaque instant». Cette doctrine du Jihad du cœur est à rapprocher du Soufisme que professait Cheikh Bamba : «J’affirme continuellement l’Unité Divine, la Jurisprudence islamique et le Soufisme très glorieux» dit-il. En effet, sans être affilié aux Quadri ou aux Tidjanes, Cheikh Ahmadou Bamba a ouvert une troisième voie. «Le Soufisme, c’est la science qui concerne tout ce qui s’attache à la relation entre Dieu et l’être humain, en prenant en compte le cœur comme moyen d’étude et d’analyse» dit Bamba. Pour les Soufis, «le vrai bonheur consiste dans l’oubli de soi». Cheikh Ahmadou pense que les vertus essentielles du Mouride sont la purification, le renoncement aux satisfactions «Soit comme le petit âne qui ne mangera pas la charge qu’il porte» ou «apprends à prier pour plaire à Dieu, n’apprends pas à prier, pour le faire avec ostentation».
En 1886, Cheikh Bamba fait une déclaration de fondation du Mouridisme «J’ai reçu de mon Seigneur l’ordre de mener les Hommes vers Dieu. Ceux qui veulent prendre cette voie n’ont qu’à me suivre. Quant aux autres qui ne désirent que l’instruction, le pays dispose assez de lettrés. Allez auprès de qui vous voulez !». ll veut réhabiliter les valeurs culturelles de base de l’Islam : «Je n’ai point fondé une confrérie, j’ai plutôt trouvé la voie qu’avait scrupuleusement suivie le Prophète, je l’ai défrichée plus proprement je l’ai rénovée dans toute son originalité» dit Bamba. La seule chose qui soit à la portée de l’homme n’est pas de «devenir» un avec Dieu, mais seulement de se sentir «un» avec son Seigneur. La société occidentale a tué Dieu et l’homme est devenu son propre Dieu. C’est pendant cette période faste et à partir de 1888, que les disciples affluent autour de Cheikh Ahmadou Bamba, et cela commence à inquiéter le colonisateur français. Si certains Mourides, sous la direction d’Ibra SARR, appellent à la guerre sainte, Cheikh Ahmadou Bamba écrit au gouverneur en juillet 1889, pour lui dire qu’il «n’avait besoin de rien en ce bas monde futile et périssable». De 1891 à 1895, le Baol jouit d’une tranquillité absolue.
2 – La prière par le travail ou la religion de l’effort
La valeur travail a été incorporée à la doctrine mystique de Cheikh Ahmadou Bamba. «Travailler, c’est prier. Travaillez pour moi, je prierai pour vous», cette citation a été attribuée à Bamba. En tout cas quelle que soit l’authenticité de cette formule, celle-ci sanctifie le travail, valorise l’esprit d’initiative et condamne, par la même occasion, l’oisiveté. Pour Abdoulaye WADE : «Le Mouridisme et le protestantisme sont les deux seules religions qui définissent une telle attitude (sanctification du travail) à l’égard de l’économie» et WADE ajoute «travailler fait partie de l’action de suivre Dieu». Il en conclut que «le potentiel doctrinal du Mouridisme est un important capital capable de nourrir un interminable bond en avant». Les Mourides sont initialement des agriculteurs ; ils cultivent l’arachide, une denrée servant à nourrir les esclaves et qui a été introduite au Sénégal en 1840. Les Mourides travaillent leurs champs en psalmodiant des prières. Pour Bamba, le «travail fait partie de la religion». Le Mouridisme s’inspire dans sa valeur travail de la tradition musulmane, d’un Hadith du Prophète : «Nul n’a jamais consommé une meilleure nourriture que celle qu’il a gagnée par le travail de sa main. Travaille pour ce monde comme si tu devais vivre éternellement, et travaille pour l’Au-delà, comme si tu devais mourir demain !». Il n’était pas indigne d’un homme, quel que fût son statut social, de gagner sa nourriture à la sueur de son corps et par le travail de ses mains. Les Mourides acquirent progressivement la religion de l’effort, car ils finirent par se rendre compte que seul l’amour du travail pouvait leur permettre de créer la personnalité appropriée à leurs besoins.
B – Cheikh Ahmadou Bamba : un héritage contrasté et ambivalent
Le message de Cheikh Ahmadou est resté, plus que jamais vivant, puisque sa descendance est assurée. Depuis 1927, soit en 90 ans, 7 Khalifes des Mourides se sont succédé après la disparition de Cheikh Ahmadou Bamba : Modou Moustapha de 1927 à 1945, Fallou de 1945 à 1968, Abdoul Ahad, de 1968 à 1989, Abdoul Khadre de 1989 à 1990, Salihou de 1990 à 2007 et Mouhamadou Lamine Bara, de 2007 à 2010 et depuis 2010, Sidy Mokhtar de 2010 à 2018 et Cheikh Mouhamadou Mountakha depuis 2018. L’héritage de Cheikh Ahmadou Bamba oscille entre une grande fidélité à la tradition, et dans une certaine mesure, une trahison à son message.
1 – Une grande fidélité des héritiers à la mémoire de Bamba
A bien des égards, les héritiers de Cheikh Bamba ont été fidèles à sa mémoire, par de puissants actes symboliques. Ainsi, ils ont continué et terminé la grande mosquée de Touba entamée en 1925. Une autre grande et somptueuse mosquée, «Massikul Jinan» en référence aux «Perles du Paradis» de Cheikh Bamba, a vu le jour en 2019, à Dakar, la capitale du Sénégal, mettant ainsi le Mouridisme au centre de la vie citoyenne de ce pays. Cet édifice «constitue un symbole indéniable de la puissance de la foi des disciples mourides, une victoire pour l’islam et tous les musulmans» dit le président Macky SALL.«Le vrai Mouride, c’est celui qui aime toujours son chef», Cheikh Ahmadou Bamba est un personnage charismatique «la simple vue d’Ahmadou Bamba en prières ou bénissant, le jet de sa salive sur les fidèles prosternés, plongent certains dans des crises hystériques où tous veulent participer. On se roule aux pieds du Saint, on baise ses babouches, le bas de son boubou, on lui tend les mains» écrit Paul MARTY. C’est surtout le Magal, créée en mémoire d’Ahmadou Bamba, ce grand pèlerinage annuel de Touba, qui est le plus grand rassemblement Mouride du monde, avec plus de 5 millions de fidèles, le pèlerinage à la Mecque ne touchant que 3 millions de personnes. C’est Mamadou Moustapha qui l’a inauguré en 1928 ; il est fixé en 1946 par le Khalife Falilou au 18 du mois lunaire de Safar, anniversaire du retour de Cheikh Bamba à Diourbel et sa vision prophétique décisive.
Cheikh Ahmadou Bamba rejetait le culte de la personnalité et demandait d’adorer exclusivement Dieu. «Celui qui se retranche loin des vanités, est du nombre de ceux qui sont intelligents»dit Cheikh Bamba. Certaines dérives du Magal soulèvent des interrogations. Pendant cette cérémonie le Sénégal est bloqué et l’Etat n’a aucun droit de regard (drogue ou prostitution, marchandises illicites) de tout ce qui se passe dans Touba, la capitale religieuse. On observe le décalage entre les agissements de certains Mourides fanatisés et les enseignements de Cheikh Ahmadou Bamba.
2 – Les entorses ou graves interrogations concernant l’héritage de Bamba
La relation des successeurs d’Ahmadou Bamba avec le pouvoir politique et le rapport à l’argent. L’irruption de la politique est apparue lors du Califat de Falilou M’Backé, un frère de Bamba, dont la légitimité a été contestée par Cheikh Ahmadou M’Backé, le fils de Bamba. Falilou a recherché l’appui du colon, contre son neveu classé à gauche, puisqu’à la fin de sa vie ; celui-ci avait même soutenu Cheikh Anta DIOP, l’éminent égyptologue. Initialement, et après la loi Lamine Guèye du 7 mai 1946, lors des élections du 17 juin 1951, Falilou avait soutenu le BDS de SENGHOR, contre Lamine GUEYE, parce qu’il s’était engagé à terminer les travaux de la Grande mosquée de Touba, entamée depuis 1925. Mais le grand saut dans la vie politique des Mourides a été l’année 1962, Falilou a aidé SENGHOR pour destituer Mamadou DIA, président du Conseil. Depuis, lors Abdou DIOUF s’est rapproché de Abdou Lahat en sollicitant le «N’Diguël» (consigne de vote). Durant sa magistrature, maître Abdoulaye WADE (président de 2000 à 2012) un Mouride, est allé se prosterner devant le Khalife «Je suis allé à Touba en disciple mouride, et non en ma qualité de chef de l’État» dit-il. En 2012, les campagnes électorales de Macky SALL et Abdoulaye WADE ont démarré à Touba. Sous Macky SALL (président depuis 2012), au cours du référendum du 20 mars 2012 certains Mourides, lors des prêches du vendredi, avaient appelé à voter contre ce projet de loi constitutionnelle, et saccagé des bureaux de vote.
De nos jours, les Dahiras ou autres évènements religieux sont devenus un moyen de soutirer de l’argent à l’Etat. Dans ces dérives, les héritiers de Bamba ont contaminé les autres familles maraboutiques se partageant le gâteau : les Kounta à N’Diassène, les SY à Tivaoune, les Thiaw (Layène) dans le Cap-Vert, les Niasse à Kaolack, les BA à Madina Gounasse, les SECK à Thiénaba, les SALL à Louga. Parmi les 36 associations religieuses reconnues, aucune n’opère dans le domaine social ou culturel, mais elles organisent des chants religieux, comme un moyen d’obtenir des financements. Cette recherche, active de financements, des Mourides et des autres religieux, est manifestement en contradiction avec la pensée de Bamba : «Quant aux détenteurs de pouvoir, je ne les approche pas, je n’ai aucun désir à leur monde et je ne chercherai grandeur qu’auprès d’Allah le Roi des rois» dit Cheikh Ahmadou Bamba. En effet, durant toute sa vie, Cheikh Ahmadou Bamba s’est tenu à l’écart du pouvoir politique et des choses de ce «bas monde» ; il n’a cherché d’autre gloire que celle d’un saint de l’Islam, en pratiquant la générosité et la charité. Fuyant la lumière et le pouvoir politique, d’une grande intégrité et probité, Bamba est resté désintéressé des choses matérielles.
Depuis l’indépendance, il n’y a ni écoles, ni forces de l’ordre ou de gouverneur à Touba, les Mourides ayant pris le pouvoir, défient l’autorité de l’Etat. D’autres dérives, non imputables directement aux Mourides (Modou Kara, N’Diguël, Béthio THIOUNE) ont vu naître de graves collusions, dans un pays laïc, entre le pouvoir religieux et l’Etat. En 2020, bien que recevant des subsides de l’Etat, le Khalife général des Mourides a appliqué, avec réticence, les mesures de l’Etat d’urgence concernant la pandémie du Coronavirus. Tout semble indiquer le Magal d’octobre 2020 serait maintenu, le virus circule encore activement dans le pays.
Cheikh Ahmadou Bamba est mort le 19 juillet 1927, à Diourbel, dans une case. Un rapport mentionne ainsi les circonstances de ce décès : «Le marabout s’éteignit, sans témoin, à une heure qui n’a pas été déterminée. Il fut découvert, étendu sans vie, sur le sable d’une case où il aimait à se retirer pour ses méditations, par son fils et héritier de prédication, Mamadou Moustapha. (…). L’administrateur jugea plus prudent de faire transporter le corps à Touba, aussi discrètement que possible et de l’y faire ensevelir provisoirement». Même mort, le colon le redoutait. Mais les talibés, dans la douleur de cette grande perte de leur guide spirituel, sont restés dignes et calmes.
En définitive, nous avons plus que jamais besoin des enseignements de Cheikh Ahmadou Bamba, une conscience morale et un extraordinaire nationaliste. La religion devrait nous libérer de l’obscurantisme et nous guider vers la Lumière. Le peuple sénégalais aspire à maîtriser davantage son destin, et pour une répartition équitable de ces nouvelles richesses. Dans ces conditions, le nationalisme et le Mouridisme, tels que le concevait Cheikh Ahmadou revêt toute son importance. Par conséquent, il faudrait redonner au Mouridisme son message initial, un appel pour l’éthique et la morale. Pour ma part, Cheikh Ahmadou Bamba BA n’appartient pas seulement qu’à la communauté Mouride, il fait désormais partie du patrimoine culturel et religieux de l’ensemble du Sénégal. J’espère qu’en 2027, lors du 100èmeanniversaire de sa disparition, l’ensemble des Sénégalais, qu’ils soient croyants ou non, lui rendront un hommage exceptionnel. Paix soit Cheikh Ahmadou Bamba BA, et «A Diaraama !».
Bibliographie sélective :
1 – Contribution de Cheikh Ahmadou Bamba
1 – 1 Ouvrages généraux
M’BACKE (Cheikh, Ahmadou Bamba), Le Wird Mouride (Ma’Houz), traduction Serigne Sam M’Baye, Dakar, Drouss, Lectures numériques Mourides, 2013, 45 pages ;
M’BACKE (Cheikh, Ahmadou Bamba), Les itinéraires du paradis, traité du soufisme (Massalik Al Jinan), traduction Serigne Sam M’Baye, Dakar, Drouss, Lectures numériques Mourides, Maroc, Dar-El-Kitab, 1984, 136 pages ;
M’BACKE (Cheikh, Ahmadou, Bamba), La prière sur la mer, par Serigne Sam M’Baye, traduit et transcrit par Papa Sall, préface de Mody Niang, Dakar, 1995 et 2014, 73 pages ;
M’BACKE (Cheikh, Ahmadou, Bamba), Les verrous de l’Enfer et les clés du Paradis (Maghâliqu-N-Nîrân wa Mafâtihul Jinan, Perfectionnement spirituel), par Serigne Saam M’Baye, Dakar, non daté, 14 pages ;
M’BACKE (Cheikh, Ahmadou, Bamba), Le viatique de la jeunesse : Traité de théologie, de jurisprudence, de perfectionnement spirituel (Tazawwudu-Sh-Shubban),traduction de Serigne Sam M’Baye, Maroc, Dar-El-Kitab, année non précisée, 44 pages.
2 – 2 – Poésie
Bibliographie complète sur Médiapart ou mon blog
Paris, le 2 juillet 2017, actualisé le 17 août 2020 par Amadou Bal BA – http://baamadou.over-blog.fr/