De nombreux pays africains sont producteurs de pétrole mais sont incapables de raffiner leurs productions. Une problématique à laquelle, la Cedeao, l’Union africaine et les partenaires techniques au développement doivent réfléchir selon le Directeur de la Société africaine de raffinage (Sar), Serigne Mboup.
Ce dernier prenait part, hier, au forum sur l’approvisionnement des pays du continent en produit énergétique.
En 2013, les capacités de production des pays africains se résumaient à peu près à 100 millions de barils par jour. Ce, pour une demande globale de 40 % en carburant, 40 % en fuel et 20 % en produits lourds. Et la participation du raffinage africain à la production mondiale s’estimait à 3,5 millions de barils par jour. Une tendance qui doit être renversée, selon le Directeur de la Société africaine de raffinage (Sar). Serigne Mboup estime que cela doit impérativement changer avec des grands projets structurants dans le secteur sur le continent. «Beaucoup de pays africains sont producteurs mais très peu raffinent leur pétrole. Je pense que cela pose un problème sur lequel la Cedeao, l’Union africaine et nos partenaires au développement doivent réfléchir. C’est vrai que pour le pétrole, l’argent n’est pas que sur les barils vendus. Mais, il est plus sur les ressources par l’ajout de la valeur ajoutée et le développement du contenu local. Donc, son adjacence porte sur le transfert de compétences et le développement d’un tissu industriel qui répondrait un peu plus aux besoins des Africains», a-t-il déclaré.
En outre, il a relevé que l’autre problématique à laquelle les raffineries africaines sont confrontées est leurs tailles réduites et leur fonctionnement par des technologies relativement anciennes. En plus de cela, le patron de la Société africaine de raffinage pointe du doigt l’absence d’entretien et la maintenance de l’espérance de vie initiale des équipements. «On est dans un contexte où nous avons besoin de nous adapter au niveau du contexte de raffinage notamment pour ce qui est de la règlementation, la qualité des produits et les complexités technologiques qui sont adjacentes. Il est possible évidemment de trouver des mécanismes de financement et de mise en œuvre. Parce que, l’on sait qu’il y a des budgets extrêmement importants mais aussi cela impactera l’environnement des véhicules qui roulent sur le continent», a-t-il soutenu. Poursuivant, il a insisté sur la nécessité pour les pays du continent de tenir compte de l’évolution des normes environnementales et mettre en norme leurs carburants. Cela, non sans soutenir qu’il y aura un impact des grosses raffineries de l’Asie et des futures raffineries africaines. «Au Sénégal, on est en train déjà de réfléchir sur ce qui pourrait être demain ce qu’on appelle une Sar 2.0 qui sera une raffinerie offshore destinée exclusivement pour le processing. Donc, traiter des bruts africains pour permettre à l’Afrique de disposer davantage d’instruments qui lui permettent de rajouter de la valeur pour ces ressources. Et, la Sar va s’adapter pour le marché national et peut-être le marché immédiatement voisin comme nous sommes déjà au Mali. Et pourquoi pas, dans le cadre des grands projets que le Sénégal est en train de développer, avec la Mauritanie», a-t-il souligné.
Par ailleurs, M. Mboup signale que les efforts à déployer pour résoudre ces difficultés sont largement justifiés par le rôle et les apports des raffineries qui non seulement garantissent l’indépendance et la sécurisation de l’approvisionnement de l’Afrique mais participent aussi des questions de souveraineté. «Au Sénégal, nous avons discuté avec le gouvernement qui a fait de la Sar un moteur de croissance. Nous avons initié une ligne sur la structure des prix, qui fait des prélèvements et qui s’élève à peu près à 2 milliards de francs Cfa par structure de prix. Elle est donc destinée à la Sar pour soutenir l’investissement. Donc, la Sar ne peut pas l’utiliser pour faire autre chose que de financer son investissement. Si ce n’était pas fait, le montant est reversé au Trésor public», a révélé M. Mboup. Non sans préciser que le montant global de cet investissement se situe à 446 milliards de francs Cfa.
Pour le représentant de la commission de l’Union africaine, Cheikh Beda, les pays du continent ont l’obligation de rendre leurs économies très solides et d’être dans la perspective d’accompagner la tendance mondiale de réduire le gaz à effet de serre. Ce, insiste-t-il, en ayant comme objectif d’avoir une croissance économique très soutenue. «L’un des vecteurs piliers de cette croissance économique sera certainement l’aspect énergie. Partant de cette réalité, il faut s’organiser de manière à avoir un soutien très fort politiquement, un agenda discuté avec les partenaires mais aussi un engagement très fort du secteur privé. Parce qu’il s’agit d’un engagement combiné», a-t-il conclu.
Adama COULIBALY