SENTV : Alors que l’UEFA avait interdit à Munich d’éclairer son stade aux couleurs arc-en-ciel en signe de protestation contre la politique de la Hongrie sur les minorités sexuelles, des supporters ont assisté à la rencontre Allemagne-Hongrie avec des masques aux couleurs LGBT. Un activiste est également descendu sur la pelouse en brandissant un drapeau, avant d’être maîtrisé par la sécurité.
Les spectateurs du stade de Munich ont répondu à l’UEFA. Au lendemain de l’interdiction faite par l’instance européenne de football à la ville bavaroise d’illuminer son stade aux couleurs arc-en-ciel pour le match de l’Euro Allemagne-Hongrie, de nombreuses personnes ont assisté à la rencontre, mercredi 23 juin, avec des accessoires en soutien à la communauté LGBT.
Alors que certains spectateurs portaient des masques aux couleurs arc-en-ciel, un homme a couru sur le terrain en brandissant un grand drapeau arc-en-ciel pendant l’hymne hongrois, avant d’être maîtrisé. Le jeune homme est arrivé dans les dos des deux équipes et a couru devant les joueurs, alignés pour écouter les hymnes. Il a été plaqué au sol et évacué.
Les organisateurs de la Marche des fiertés de Munich, associés à Amnesty International, avaient prévu de distribuer 11 000 drapeaux aux spectateurs (seules 14 000 places sont occupées, en raison des restrictions dues au Covid-19).
Un stade de Munich malgré tout aux couleurs arc-en-ciel
Un homme a fait irruption sur le terrain avec un drapeau arc-en-ciel lors du match Allemagne-Hongrie, le 23 juin 2021, à Munich.Aux abords du stade, des spectateurs allemands ont brandi le drapeau de la communauté LGBTQ.Dans les gradins, des spectateurs ont aussi arboré des masques aux couleurs de l’arc-en-ciel.
Un homme a fait irruption sur le terrain avec un drapeau arc-en-ciel lors du match Allemagne-Hongrie, le 23 juin 2021, à Munich. © Christof Stache, AFP
Cette action intervient dans un contexte politico-sportif sensible. L’UEFA, organisatrice de l’Euro, a provoqué un tollé en Allemagne et en Europe en refusant que le stade de Munich, où se déroule cette rencontre de l’Euro, soit illuminé aux couleurs arc-en-ciel suite à l’adoption d’une législation en Hongrie jugée homophobe. L’instance a invoqué son obligation de neutralité politique.
« De par ses statuts, l’UEFA est une organisation politiquement et religieusement neutre », a expliqué mardi la confédération européenne dans un communiqué. « Étant donné le contexte politique de cette demande – un message visant une décision prise par le parlement national hongrois –, l’UEFA doit refuser cette requête », a-t-elle ajouté.
En substance : l’UEFA affirme partager totalement les valeurs de tolérance promues par cette initiative, mais en tant qu' »organisation politiquement et religieusement neutre », elle ne peut pas accepter de véhiculer un message visant spécifiquement un pays ou un gouvernement.
Pour démontrer sa bonne foi, l’instance européenne a proposé d’illuminer le stade aux couleurs arc-en-ciel soit le 28 juin, soit début juillet, pour coïncider avec des événements liés à la Marche des fiertés à Munich.
« Envoyer un signal clair à la Hongrie et au monde »
Mais cette réponse négative n’a pas été du goût des défenseurs des droits LGBT. En réponse, la municipalité de Munich a pavoisé plusieurs bâtiments de la ville aux couleurs arc-en-ciel après la décision « honteuse » de l’UEFA d’interdire l’éclairage de son stade. « Nous, à Munich, nous ne nous laisserons en aucun cas empêcher d’envoyer un signal clair à la Hongrie et au monde » au sujet des discriminations visant les personnes homosexuelles, a déclaré à la presse le maire Dieter Reiter, annonçant que l’Hôtel de ville, ou encore une tour et une éolienne situés à proximité du stade Allianz Arena seraient décorés avec des drapeaux arc-en-ciel.
De nombreuses municipalités du pays ont éclairé leurs hôtels de ville de la même manière, mais aussi des salles de concert comme l’Elbphilharmonie de Hambourg, ou de grandes entreprises, comme la compagnie nationale des chemins de fer.
La loi hongroise prévoit que « la pornographie et les contenus qui représentent la sexualité ou promeuvent la déviation de l’identité de genre, le changement de sexe et l’homosexualité ne doivent pas être accessibles aux moins de 18 ans ».
Le ministre hongrois des Affaires étrangères, Peter Szijjarto, a rejeté les critiques européennes et dénoncé des « fake news ». Il a affirmé que cette loi « n’était dirigée contre aucune communauté en Hongrie (mais) seulement contre les pédophiles ». « Cette loi ne dit rien sur l’orientation sexuelle des adultes. Elle dit seulement que tant que les enfants ont moins de 18 ans, leur éducation sexuelle relève exclusivement de leurs parents, c’est tout », a-t-il déclaré, ajoutant que le vote du Parlement hongrois était « une compétence nationale qui ne devrait pas être remise en question ».
Le ministre a salué « le bon sens » des dirigeants du football européen qui ont refusé l’illumination du stade de Munich. Cela « aurait été une provocation politique envers la Hongrie », a-t-il jugé.
Mais la raison est peut-être plus pragmatique, comme le souligne Luc André, correspondant de France 24 à Berlin : « L’UEFA cherche manifestement à le ménager au mépris des valeurs affichées dans les campagnes de communication. En raison des restrictions sanitaires, l’UEFA pourrait en effet déplacer la finale de l’Euro de Londres à Budapest et elle a besoin du soutien de Viktor Orban pour cela ».
Pour l’instant, la finale doit se tenir au stade de Wembley. L’UEFA a déclaré qu’elle n’avait pas l’intention de le remplacer par une autre enceinte, mais la pression s’accentue. Le président du Conseil italien, Mario Draghi, a demandé que ce match ne se joue pas en Angleterre en raison de la hausse du nombre de cas de contaminations liés au variant Delta, apparu pour la première fois en Inde. « Notre santé est prioritaire. La propagation du variant Delta ne permet pas aux 40 000 spectateurs d’assister à la finale dans le stade de Londres », a aussi déclaré dans un communiqué mardi Peter Liese, chargé des questions de santé au sein du Parti populaire européen (PPE), premier groupe au Parlement européen.