Les partis politiques du FDS/MWS se sont réunis ce 10/10/2012 afin d’examiner le processus électoral en cours.
Ils déplorent la rupture du consensus fort s’est construit entre pouvoir et opposition au Sénégal depuis 1992 sur toutes les questions essentielles relatives à la fiabilité du processus électoral dans son ensemble.
Les présidents Diouf (1992-2000) et Wade (2000-2012) se sont aussi constamment efforcés de préserver cette culture du consensus en veillant à ce que les représentants du pouvoir dans les discussions acceptent les propositions de l’Opposition et en demandant à leur majorité parlementaire de voter les propositions reçues dans le cadre de ce consensus fort.
En dépit de la volonté affichée de tous les partis de l’opposition d’arriver à des conclusions consensuelles pour renforcer notre système électoral en le mettant totalement à l’abri des contestations sources de tous les dangers, le gouvernement n’a pas fait preuve des mêmes dispositions.
Les désaccords remettent complètement en cause le consensus qui prévaut depuis un quart de siècle sur la matière électorale et annonce un antagonisme lourd de dangers pour notre pays et certainement pour la sous-région.
C’est pourquoi les partis du FDS/MWS appellent les Sénégalaises et les Sénégalais à mener la lutte pour contraindre le gouvernement à respecter le consensus électoral et empêcher toute triche pendant les prochaines élections. Ils appellent à la marche du 14 octobre 2016 pour contraindre le gouvernement à reculer sur les questions essentielles.
1°/ SUR LA REFONTE DU FICHIER ELECTORAL
Le gouvernement a saisi comme prétexte l’avènement de la carte d’identité biométrique CEDEAO pour décider d’une refonte du fichier électoral destinée, selon lui, à en éliminer le soit disant stock mort. Il a ainsi déposé, fait voter par sa majorité à l’Assemblée nationale et promulgué une nouvelle loi, la loi 2016-27 du 19 août 2016, qui dispose que tout électeur déjà inscrit sur la liste électorale mais n’ayant pas confirmé, auprès des commissions habilitées, sa volonté d’y demeurer, sera automatiquement radié de ces listes. L’Opposition, pour sa part, a catégoriquement rejeté ce modus operandi pour les raisons suivantes :
• L’absence d’audit préalable du fichier électoral pour en maîtriser les forces et faiblesses
• Le refus de rechercher le consensus avec l’Opposition caractérisé par la précipitation avec laquelle le projet de loi a été ramené à l’Assemblée nationale pour y être voté.
• L’expérience des fraudes de l’année dernière (2015) sur l’établissement des cartes d’identité lorsque certains de nos maires et responsables à Pikine et dans d’autres endroits du pays ont surpris des commissions dépêchées par le ministère de l’intérieur en train d’établir clandestinement des dossiers pour délivrer en masse des cartes d’identité aux militants et sympathisants du parti du Président de la République. La CENA qui s’était, en son temps, transportée sur les lieux et avait constaté les faits, avait publiquement déploré de telles pratiques qui « sont préjudiciables à la bonne transparence dans le processus électoral ».
Le vote n’étant pas obligatoire, le citoyen qui s’inscrit sur les listes électorales dans le cadre de l’exercice des libertés publiques ne peut en être radié aux termes de l’article L42 sans une décision motivée et dûment justifiée. C’est ce verrou que le gouvernement vient de faire sauter en modifiant unilatéralement la loi pour permettre ainsi la radiation d’office des électeurs de l’opposition.
L’entêtement du gouvernement, soutenu par sa majorité au parlement, à vouloir radier automatiquement tous ceux qui figurent dans le fichier et qui n’auront pas confirmé leur volonté d’y demeurer, fait peser un lourd soupçon sur sa volonté de procéder à une radiation de grande ampleur d’électeurs dans les zones réputées favorables à l’Opposition et à des incorporations massives d’électeurs dans les zones réputées être favorables aux partis de la majorité.
De telles manipulations d’envergure altéreraient substantiellement la fiabilité du fichier électoral et porteraient gravement atteinte à la sincérité des scrutins à venir.
Ce qui est cocasse dans la nouvelle réglementation, c’est que l’électeur doit se présenter à la commission administrative chargée des élections pour renier son caractère d’électeur. Que cherche-t-on sinon à radier et à tricher ?
En plus, l’Etat veut créer et multiplier les commissions partout dans le pays, sans la prise en charge des représentants de l’opposition, autant dire sans l’opposition, ce qui serait une grave forfaiture. L’article 1er du décret 2016-1535 portant application de la loi 2016-27 du 19 août 2015 ne sera un assemblement de vœux pieux. L’opposition ne sera pas dans les commissions itinérantes.
2/ SUR LA CARTE ELECTORALE OU LA REPARTITION GEOGRAPHIQUE DES LIEUX DE VOTE
La dernière consultation électorale portant sur le référendum a révélé de très graves dysfonctionnements de nature à remettre en cause les résultats officiels publiés. En effet, le nombre de bureaux de vote recensés par le ministère de l’intérieur à travers sa Direction de l’Automatisation des Fichiers d’une part et, d’autre part, les chiffres de la Commission Nationale de Recensement des Votes fait apparaître 560 bureaux de vote qui n’ont pu être identifiés avec exactitude d’autant plus qu’en vertu de l’article L11 de la loi portant électoral la CENA est chargée de contrôler et de superviser toute mise à jour de la carte électorale. C’est ce que nous appelons des bureaux de vote fictifs.
Il faut ajouter que dans certaines localités, il y a des incohérences manifestes qui font douter de la fiabilité même du fichier. Il en est ainsi par exemple à Mbeuleukhé dans le département de Linguère avec 128 % d’inscrits par rapport à la population totale recensée, ou encore à Walaldé (département de Podor) avec 88 %. Il en est ainsi dans au moins quatorze (14) autres localités du Sénégal.
3/ SUR L’ORGANISATION DES ELECTIONS PAR UNE AUTORITE CONSENSUELLE
Dans un système totalement contrôlé ou majorité et opposition ont obtenu un consensus durable sur toute la matière électorale, il est normal de confier la gestion du vote par l’autorité gouvernementale, tout en supprimant les organes de régulation ou de supervision du scrutin.
Par contre dans un système où les soupçons de fraude sont permanents et le consensus fragile entraînant l’instauration d’organes de régulation, de supervision ou de contrôle avec la participation d’observateurs étrangers, il ne fait aucun doute que l’organisation des élections par une personnalité consensuelle peut constituer une garantie assurant davantage de transparence pour rassurer et éviter les tensions.
L’expérience a démontré que les élections ayant entraîné une alternance paisible, saluée par toute la communauté tant nationale qu’internationales, ont toutes été organisées par une personnalité neutre, consensuelle et sur qui ne pèse aucun soupçon de partialité.
Par contre, il ne fait aucun doute qu’une personnalité membre du parti présidentiel, exerçant au surplus des fonctions électives ne rassure pas puisqu’il n’est pas possible dans toutes les conditions visées ci-dessus d’être juge et partie.
Il s’y ajoute qu’il est connu de tous, démontré et confirmé par l’organe de contrôle des élections que l’actuel ministre de l’intérieur ainsi que ses services et partisans sont impliqués dans des fraudes et tentatives grotesques de fraude confirmant les craintes de l’incapacité par une autorité politique d’organiser des élections transparentes dans le contexte actuel.
4/ SUR L’AUGMENTATION DU NOMBRE DE DEPUTES
Le gouvernement propose la création de quatre (04) nouveaux départements : (Afrique, Europe, Asie-Moyen-Orient, Amériques-Océanie) et l’affectation de dix (10) députés répartis entre ces nouveaux départements. Cette proposition fera passer le nombre de députés de cent cinquante (150) à cent soixante (160).
Les partis de FDS/MWS ont marqué leur désaccord en ce qui concerne l’augmentation du nombre des députés au vu de la situation économique et sociale difficile que traverse le pays. Par ailleurs, elle est en désaccord avec le gouvernement qui remet en cause le principe de l’égalité entre les citoyens dans la répartition des quotas de députés. En effet, ils veulent allouer les quotas de députés sur des bases différentes. S’il s’agit des députés de l’intérieur, ils sont répartis au prorata du poids démographique de chaque département tandis que, pour l’extérieur, la répartition est faite sur la base du nombre d’inscrits sur la liste électorale. Ainsi un département de l’Intérieur qui a 1.200.000 habitants peut avoir cinq (5) députés là où l’extérieur aura dix (10) députés avec seulement 200.000 inscrits. Le saucissonnage est ici manifeste pour s’assurer une majorité artificielle au parlement qui ne correspondrait pas à la volonté de l’écrasante majorité des populations de notre pays.
5/ SUR LE BULLETIN UNIQUE
Du temps où ils étaient à l’opposition, l’instauration du bulletin unique était une revendication de ceux qui sont aujourd’hui aux affaires. C’était également une proposition formulée et adoptée par les « Assises Nationales ». Le bulletin unique figure enfin dans les conclusions du rapport de l’Union Européenne comme proposition forte.
Son adoption ne devrait donc poser aucun problème sauf que les représentants du pouvoir s’y opposent aujourd’hui.
6/ SUR LE MODE DE SCRUTIN
Deux propositions sont faites pour moderniser notre système électoral et le rapprocher des meilleurs standards : La suppression du scrutin à un tour et la répartition égalitaire du nombre de députés entre le scrutin majoritaire et le scrutin proportionnel.
Pour le scrutin à un tour, le moment nous semble venu au Sénégal de généraliser le scrutin majoritaire à deux tours, comme c’est le cas pour l’élection présidentielle. Avec l’actuel mode de scrutin, le groupe de la majorité à l’assemblée nationale avait raflé en 2012, 80% des députés avec seulement 53% des suffrages exprimés. Dans nombre de départements la majorité actuelle a remporté les sièges avec parfois moins de 40% des suffrages valablement exprimés.
Autant en son temps le système actuel constituait une avancée puisque nous sortions à peine du parti unique de fait, autant après plusieurs décennies d’exercices démocratiques le système du ‘raw gàddu’ (majoritaire à un tour) est devenu inique.
7/ SUR L’ACCES AUX MEDIA D’ETAT
La télévision publique, dirigée pour la première fois depuis plus d’un demi-siècle par un élu membre du parti présidentiel n’a pas couvert la campagne électorale lors du dernier scrutin référendaire. Elle s’est contentée de ne donner la parole qu’aux partisans du « oui », devenant de fait une espèce d’organe central des partis de la majorité présidentielle.
Le directeur de cette structure a refusé, impunément, de respecter les injonctions de l’organe de contrôle et de régulation des médias.
Cette situation est inacceptable en démocratie et oblige de renforcer les pouvoirs de l’organe de contrôle et de régulation des médias pour la laisser seule organiser ou superviser toutes les émissions à caractère politique ainsi que la couverture des manifestations et activités des partis politiques.
Pour lui donner les moyens de son action cet organe devrait avoir tous les pouvoirs lui permettant de prononcer des sanctions contre tout contravenant aux règles assurant le libre accès aux média et un traitement égal des différents partis de la majorité et de l’opposition.
Communiqué de presse