Il est l’homme qui a créé la surprise en remportant l’élection présidentielle en Gambie, alors que tout le monde disait la victoire du président sortant, au pouvoir depuis 22 ans, jouée d’avance. Adama Barow est l’homme d’affaires qui a réussi à mobiliser, fédérer l’opposition en promettant de relancer l’économie du pays, l’une des plus fragiles de la région. Comment cet inconnu du grand public en Gambie il y a quelques mois a-t-il pu s’imposer face à Yahya Jammeh ? Sa figure imposante et la longue tunique qu’il porte le plus souvent ont récemment fleuri un peu partout dans les rues, mais il y a peu, rares étaient les Gambiens qui auraient pu associer un visage à ce nom. Adama Barrow a le même âge que Yahya Jammeh, 51 ans, mais là où l’ex-président brille par son excentricité, lui à la réputation d’être un travailleur acharné et discret.
Et c’est presque par hasard qu’il s’est retrouvé à la tête de la coalition d’opposition. Après qu’Ousainou Darboe, le président de son parti, le Parti démocratique uni (UDP), a été condamné à trois ans de prison cet été, il a été désigné pour le remplacer. Lui était trésorier du parti où il militait depuis 1996 en parallèle d’une carrière dans l’immobilier.
Avant de faire fortune, Adama Barrow a été garde du corps d’un homme d’affaires gambien influent, le beau-père de Dawoda Jawara, l’homme que Yahya Jammeh a renversé en 1994. Il a aussi vécu l’exil dans sa jeunesse, trois ans et demi en Grande-Bretagne. Un épisode semble-t-il douloureux. Il était sans doute loin alors d’imaginer qu’il rentrerait un jour dans l’histoire en l’emportant dans les urnes face à Yahya Jammeh.
La promesse d’un gouvernement d’union
Adama Barrow a voulu faire de sa candidature un symbole du retour à une véritable « unité nationale ». Lorsqu’il été désigné en novembre à la tête de la coalition d’opposition, il a d’ailleurs démissionné de son parti pour se présenter en indépendant et ainsi assumer pleinement son rôle de rassembleur.
Certes il était il y a peu un quasi-inconnu sur la scène publique de son pays et il a fallu que plusieurs leaders de son parti soient emprisonnés pour le porter à la lumière, mais dans une Gambie au comble de l’exaspération après 22 ans de règne de Yahya Jammeh, beaucoup voyaient en sa candidature une menace sérieuse pour l’ex-président. Les Gambiens s’étaient mobilisés comme jamais au cours de sa campagne. Adama Barrow avait même déclaré qu’il n’accepterait pas la défaite.
Celui qui durant des semaines a fustigé les atteintes aux droits de l’homme et la descente aux enfers de l’économie de son pays a promis une fois élu de redresser la Gambie politiquement et économiquement, et de former pour cela un gouvernement d’union de transition qui se donnerait trois ans pour remettre les choses à plat avant d’organiser des élections libres auxquelles il a promis de ne pas se porter candidat.
RFI