SENTV.info : Le candidat malheureux à la présidentielle béninoise de 2016 a été condamné en appel pour « dépassement de frais de campagne électorale » à quatre ans d’inéligibilité et cinq millions de F CFA d’amende.
Le verdict de la Cour d’appel de Cotonou est tombé ce mardi matin. Il confirme, en partie seulement, la condamnation en première instance de l’ancien Premier ministre béninois. Lionel Zinsou, reconnu coupable en appel de « dépassement de frais de campagne électorale », écope de quatre ans d’inéligibilité et cinq millions de francs CFA d’amende (environ 7 600 euros).
En première instance, les juges l’avaient condamné à cinq ans d’inéligibilité, et fixé l’amende à 50 millions de francs CFA. Surtout, ils avaient condamné Lionel Zinsou à six mois de prison avec sursis. Une peine qui disparaît du jugement en appel : les juges ont en effet rejeté le chef d’accusation de « faux et usage de faux », considérant qu’il n’était pas constitué. Ils ont suivi en cela le réquisitoire délivré par le procureur lors de l’audience du 4 février dernier.
« Décision de non-droit »
Lionel Zinsou a désormais la possibilité de déposer un recours devant la Cour de cassation. Une solution qui est « envisagée » par l’avocat de l’ancien Premier ministre, Me Robert Dossou, et d’autant plus privilégiée par la défense que les juges d’appel n’ont conservé que les charges relevant du contentieux électoral. Or, la Cour suprême, compétente en matière de litiges relatifs au processus électoral, avait décidé, après la présidentielle de 2016, de ne pas engager de procédure à l’encontre de Zinsou.
Très remonté contre la décision de la Cour d’appel, Me Robert Dossou, contacté par Jeune Afrique, estime que cette condamnation est « une décision de non-droit : les juges ont préféré faire plaisir au pouvoir plutôt que de dire le droit ».
Pour l’avocat, qui fut président de la Cour constitutionnelle du Bénin de 2008 à 2013, « il n’y avait aucune pièce justifiant matériellement d’un dépassement de frais de campagne. Tout le dossier ne tient que sur la parole du procureur ». Pour Me Robert Dossou, « l’objectif est clair : il s’agit de rendre inéligible Lionel Zinsou », car, estime l’avocat « le pouvoir veut écarter tout candidat crédible potentiel à la présidentielle de 2021 ».
« Il n’y a pas d’instrumentalisation politique de la justice », assurait au contraire à Jeune Afrique Séverin Quenum, le ministre béninois de la Justice, interrogé sur le sujet fin janvier. Il affirmait notamment que, dans ce dossier, « Lionel Zinsou est poursuivi pour un chef d’inculpation clair : dépassement des frais de campagne. Ceux-ci sont avérés, attestés par des pièces qu’il n’est pas en son pouvoir de nier ».
L’ancien Premier ministre de Thomas Boni Yayi s’était lancé dans la course à la présidence en 2016 sous les couleurs des Forces cauris pour un Bénin émergent (FCBE), le parti du président sortant. Il avait alors obtenu le soutien du Parti du renouveau démocratique (PRD, d’Adrien Houngbédji) et la Renaissance du Bénin (RB, de l’ancien président Nicéphore Soglo).
Arrivé en tête du premier tour, il s’était finalement incliné au second face à Patrice Talon, ne recueillant que 34,6 % des suffrages exprimés, contre 65,4 % pour son adversaire.
Bras de fer avec Mahamadou Bonkoungou
Il est accusé d’avoir, lors de cette campagne, dépassé le montant maximal de dépenses autorisées (2,5 milliards de F CFA, soit 3,8 millions d’euros). Un dépassement que le principal intéressé et ses avocats ont toujours nié, insistant par ailleurs sur le fait que la Cour des comptes n’avait relevé aucun manquement après avoir étudié ses comptes de campagne.
L’accusation s’est notamment appuyée sur un autre dossier pour fonder ses accusations de dépassement de frais de campagne : le litige qui a opposé Lionel Zinsou à l’homme d’affaires burkinabè Mahamadou Bonkoungou.
Au centre du contentieux : 15 milliards de F CFA (23 millions d’euros) présumés avoir été empruntés par Zinsou auprès de Bonkoungou, à la veille de la campagne. Après avoir un temps bataillé devant les tribunaux de Cotonou et de Paris, l’affaire avait finalement débouché sur un règlement à l’amiable, notamment grâce à la médiation du chef d’État ivoirien Alassane Ouattara et de son homologue guinéen Alpha Condé.