SENTV : L’Aéroport international Blaise Diagne est plus que jamais confronté à un problème de gestion qui l’installe dans une zone de turbulence. Deux Dg et un Pca ont sauté en quelques mois.
Après 4 ans à la tête de Limak-Aibd-Summa (Las), la société de gestion de l’Aéroport international Blaise Diagne, Xavier Mary quitte le cockpit. Démission ou limogeage ? Mystère pour le moment. Ce que l’on sait par contre, c’est que le désormais ex-directeur général de Las était sur siège éjectable.
En effet, trois mois après son arrivée à la direction de l’Aibd en novembre, en remplacement d’Abdoulaye Mbodji, Doudou Ka n’avait pas hésité à rendre public son bras de fer avec Xavier Mary. Il accuse le Français de détournement de fonds. « LAS collectait l’argent d’autrui pour l’utiliser pour son propre compte. Cela dure depuis trois ans. Ça fait, au moins, 6 milliards F Cfa», déclarait en début février l’ancien Dg du Fongip.
Selon une source interne, il s’agit de la Redevance de développement des infrastructures aéroportuaires (RDIA) collectée par LAS qui devait répartir la somme aux différents ayants droit. « Malgré plusieurs réclamations, il n’a pas payé. Il disait qu’il attendait que l’Etat lui paye, que Air Sénégal lui paye pour rembourser », indique cette source.
Selon notre interlocuteur, Xavier Mary avançait toujours le prétexte de la fermeture de l’aéroport et du manque à gagner qu’elle a engendré pour retarder le paiement.
Trois dirigeants en quelques mois
Par ailleurs, les Turcs ont été écartés des réunions de coordination ministère du Transport aérien. Ni Las, ni 2As n’ont participé aux dernières rencontres.
Outre Xavier Mary, il y a eu le départ de l’ancien président du Conseil d’administration, Abou Lo. Ce dernier a été nommé ambassadeur du Sénégal au Congo Brazzaville, à l’issue du conseil des ministres du 20 janvier dernier. Un départ qui, lui aussi, a un rapport avec les 6 milliards soulevés par Mame Diarra Fam, sanctionnée par Moustapha Niass.
« Le contre-feu de BBY a éclipsé le limogeage de M. Abou Lô, PCA de la société Aibd, envoyé comme ambassadeur au Congo Brazzaville. Auparavant, vous vous souvenez, la députée Mame Diarra Fame avait été limogée illégalement par le Président Moustapha Niasse du Conseil d’Administration de la société Aibd. Dénoncer cet acte illégal m’a valu une réaction incongrue de Moustapha Niasse en séance plénière. En vérité, il y aurait un trou de 6 milliards Fcfa dans les comptes de l’Aibd dénoncé par Mme Fame et non démenti par le nouveau Directeur Général de l’Aibd », écrivait le député Mamadou Lamine Diallo, le 16 février, dans «Questekki », la question hebdomadaire que le leader de Tekki adresse à Macky Sall et son gouvernement.
En outre, en septembre 2019, le Collectif des prestataires et investisseurs sénégalais à l’Aibd (Copis) ainsi que les travailleurs avaient invité les Sénégalais à un grand rassemblement pour dénoncer la gestion des Turcs. Parmi les faits incriminés, des redevances aéroportuaires « dix fois plus chères que celles des aéroports africains ».
« LAS déroule le tapis rouge aux investisseurs étrangers »
Il s’y ajoute une concurrence déloyale à laquelle fait face Senecartour qui a pourtant, d’après eux, le contrat d’exclusivité sur le transport. Si l’on en croit ce collectif, tout est fait pour écarter les Sénégalais. Il accuse même les étrangers d’avoir des pratiques qui indiquent qu’ils sont en terre conquise.
« LAS déroule le tapis rouge aux investisseurs étrangers malgré plus de 20 milliards de financement et 700 emplois créés par le Copis. Nous dénonçons la violation flagrante des contrats d’exclusivité par LAS, la concurrence déloyale face à Infinite Lounge. LAS édite un magazine dans le dos de Global communication, en charge de la communication dans la plateforme… », énumère avec regret le Copis.
Aujourd’hui, c’est un Turc Askin Démir, DG de 2AS qui est pressenti pour gérer l’intérim à la place de Xavier Mary. Il n’est pas évident que les Sénégalais qui disaient « Non au néocolonialisme turc et à leur acolyte français, Xavier Mary » applaudissent une telle décision. Surtout que d’après notre source, Askin Démir aussi est coupable de manquement par rapport à son cahier des charges. « Il avait promis d’acheter du matériel de transit, ce qu’il n’a pas encore fait », révèle la source.
L’Aibd est donc plus que jamais confronté à un climat instable qui ne favorise pas une navigation en toute sérénité. L’Etat va-t-il assurer lui-même la gestion ? Rien n’est sûr pour le moment.