Pétrole : La chute du baril, entre souffle budgétaire et turbulences économiques pour le Sénégal

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SENTV : Le cours du pétrole brut a chuté sous la barre symbolique des 60 dollars le baril (environ 35 644 F CFA), un seuil jamais atteint depuis février 2021. Ce recul spectaculaire est l’un des effets collatéraux de la guerre commerciale intensifiée entre les États-Unis et certains de leurs partenaires stratégiques. Si cette baisse apporte un bol d’air budgétaire au Sénégal, elle soulève aussi de sérieuses interrogations sur la rentabilité de ses ambitions pétrolières naissantes.

Une respiration pour les finances publiques
Interrogé par le journal L’Observateur, le député Adama Diallo, ancien directeur général de Petrosen Holding, résume la situation en une phrase : « C’est un couteau à double tranchant ». D’un côté, la diminution du prix du baril représente une aubaine pour les finances publiques. « Le prix réel du carburant repose sur deux composantes : la subvention étatique et le prix à la pompe », explique-t-il. Or, malgré la chute du brut, les prix à la pompe – 775 F CFA pour le litre de gasoil et 990 F CFA pour le litre de Super – n’ont pas fléchi, permettant à l’État de réduire mécaniquement le montant de ses subventions.

Cette stratégie budgétaire prudente est saluée par les institutions financières internationales. Le Fonds monétaire international (FMI) avait d’ailleurs recommandé au Sénégal de rationaliser ses dépenses de subvention, dans un contexte marqué par une pression accrue sur les finances publiques due à une dette en hausse et aux exigences d’investissement dans les secteurs prioritaires (santé, éducation, infrastructures).

Un signal d’alerte pour le projet Sangomar
Mais cette baisse du baril n’est pas sans conséquences. Elle fragilise les projections économiques fondées sur les ressources pétrolières à venir. Le champ offshore de Sangomar, opéré par Woodside Energy, avec une première production attendue courant 2025, a été dimensionné sur la base d’un baril à 60 dollars.

« Il y a de quoi s’inquiéter sur la viabilité économique à court terme du projet, ainsi que sur les recettes fiscales escomptées dans la loi de finances », avertit Adama Diallo. Si le prix du baril devait rester en dessous de ce seuil pendant une période prolongée, le gouvernement pourrait être contraint de réviser ses prévisions budgétaires via une loi de finances rectificative.

Selon les estimations initiales du ministère des Finances, les revenus pétroliers devraient générer, à pleine production, jusqu’à 400 milliards de F CFA par an pour l’État sénégalais. Mais cette projection repose sur un marché pétrolier stable, ce qui n’est plus garanti.

Entre soulagement immédiat et incertitude structurelle
En définitive, la baisse des cours du pétrole place le Sénégal dans une situation paradoxale. À court terme, elle offre un certain répit à un budget sous tension. Mais à moyen terme, elle risque de compromettre les perspectives de diversification économique fondées sur l’exploitation des hydrocarbures.

Alors que le pays s’apprête à faire son entrée officielle dans le cercle des producteurs de pétrole, cette conjoncture rappelle la volatilité d’un marché dont dépendront, en partie, les ambitions de développement du Sénégal.

La rédaction de la SENTV.info 

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