Quand l’amour prend le pouvoir au sein des couples présidentiels

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Nos chers prétendants à la magistrature suprême ne sont pas juste doués pour exercer le job de président de la République – Ils sont également doués à fredonner de beaux textes, de produire de belles déclarations et d’immortaliser leur amour

Sous les lambris dorés du pouvoir, l’amour se révèle et se joue sous les yeux de la République. Nos chers prétendants à la magistrature suprême ne sont pas juste doués pour exercer le job de président de la République. Ils sont également doués à fredonner de beaux textes, de produire de belles déclarations d’amour et d’immortaliser leur amour. Pour le meilleur et le pire, envers et contre tous. Quoique la polygamie soit légalisée, les présidents qui se sont succédé à la tête du pays, préfèrent se la jouer monogames. De Senghor, en passant par Abdou Diouf puis Abdoulaye Wade et aujourd’hui Macky Sall, tous se sont engagés à vivre que pour leur tendre épouse. Nos premières dames. A l’occasion de la Saint-Valentin, Le Témoin fait redécouvrir les couples présidentiels sous d’autres coutures.

«La Normande de long lignage aux yeux de moire vert et or»

De tous les présidents qui sont passés à la tête du Sénégal, il est le plus glamour. Lorsqu’il s’agit de parler de sa «Normande de long lignage aux yeux de moire vert et or», l’encrier de Senghor ne se tarit jamais. Lequel fait parler son cœur. Presque dans toutes ses envolées lyriques, il y a une phrasée, un vers qui renvoie à Colette Hubert de Betteville à qui il semble vouer un amour incommensurable. Qui défie le temps. Même si Senghor l’a épousée en secondes noces en 1957 après l’échec d’un premier mariage avec Ginette Eboué. Et depuis, Colette s’est employée à faire tourner cette page à celui qu’il appelle affectueusement Léopold. Comme tous couples, les Senghor ont connu leur lot de tumultes. D’angoisses. De blessures. Surtout avec la mort prématurée de leur unique fils Philippe Maguilen Senghor en 1981.*

Malgré tout, leur amour «source inépuisable de souverain réconfort surmonte cette douloureuse épreuve», commente un proche du couple présidentiel. Qui est resté main dans la main jusqu’à la mort du poète-président en 2001, à Verson. «Je savais que c’est toujours difficile de réconforter la perte d’un être cher. Dans un grand chagrin, on a besoin d’être seul. C’est une blessure profonde qui ne se refermera jamais. Mme Senghor est une dame digne et formidable qui a couvert son mari d’affection minute par minute jusqu’à sa mort », confie Mme Viviane Wade, «l’oreille amie» au journaliste Cheikh Diallo. Aujourd’hui comme une épitaphe, le poème Lettres d’hivernage, comme tant d’autres, renseignent sur leur grand amour qu’ils se vouaient, l’une à l’autre. Que c’est beau l’amour. et là, il a définitivement pris le pouvoir dans le cœur de Senghor.

«Le soleil brille mais Elisa est plus lumineuse que le soleil…»

Le président Abdou Diouf n’a pas le verbe de Senghor mais il reste, quand bien même, un grand parolier. Leur amour est aussi grand que le cou d’une girafe. Certainement inspiré par son parrain en politique, Abdou Diouf a composé une ode à l’honneur d’Elisa. Qui défie le temps. Comme un symbole de leur puissant amour qui a démarré en 1963. «(…) La grande chance de ma vie, c’est d’avoir rencontré Elisabeth. Elle m’a toujours motivé dans tout ce que j’ai eu à faire. Elle a surtout veillé à séparer cette vie privée de ma vie publique. Elle s’est comportée dans les différentes fonctions que j’ai occupées avec beaucoup de discrétion et beaucoup d’efficacité dans ce qui était de son ressort. J’ai dit quelque part que le soleil brille mais elle est plus lumineuse que le Soleil. Avec elle, j’ai eu quatre enfants, deux garçons et deux filles, 13 petits-enfants et un arrière-petit-fils. Je suis homme comblé, heureux», confiait-il, comme un amoureux transis, dans «Abdou Diouf, un destin francophone, un documentaire de Jerôme Sesquin et Hervé Bourges (2010), docu-portrait 54 minutes».

«Cette cantinière, épouse, sœur, mère de son mari…»

On ne leur connait pas de déclaration d’amour en outrance. Il n’empêche que le couple Wade est aussi fort que du roc. Malgré les soubresauts de la lutte du pouvoir puis de la perte du pouvoir, le couple est resté entier. Qui s’était rencontré sur les bancs de l’Université de Besançon en 1952. Un amour estudiantin. Et les deux étudiants se marièrent en 1963. Vincent Hugeux, journaliste spécialiste de l’Afrique, dans son ouvrage intitulé « les reines d’Afrique » parle du rôle joué par Viviane Vert Wade au côté de son époux d’opposant puis de président de la République et aujourd’hui de nouveau opposant farouche à son ex-fils putatif.

«La première Dame ça peut être la meilleure alliée ou la pire ennemie de son président d’époux. Regardez le cas de Viviane Wade. Elle a été pour le vieil Abdoulaye Wade cette avocate brillante, visionnaire et parfois déroutante, elle a été cantinière, banquière, infirmière, femme, épouse, sœur, mère, tout ce que vous voulez », souligne-t-il dans son livre. Aujourd’hui, avec la perte du pouvoir, elle saura peut-être trouver les mots pour lui redonner ou remonter le moral en 55 ans de mariage.

Enfin, l’encens au palais de la République !

Quoique Marième Faye le décrive comme «un grand sentimental», Macky Sall ne fait pas dans les déclarations d’amour. Du moins publiquement. Il essaye d’étouffer, de tuer dans l’œuf ses sentiments. Même sous les effluves de l’encens. «C’est un des professeurs de Marième, M.Talla, qui, séduit par les multiples qualités qu’il a observées chez son élève, Marième, parlera d’elle à un de ses amis, Macky, alors en stage à Diourbel dans le cadre de sa formation à l’Institut des sciences de la terre (Ist)», révèle Adama Faye au journal l’Observateur dans un docu-enquête consacré à Marième Faye Sall. Son frangin Adama Faye se souvient comme si c’était hier, de cette première visite de son futur beau-frère dans la maison familiale : «Nous étions tous réunis dans la cour, narre-t-il. Car en ces temps, quand un homme rendait visite à une fille, cela se faisait en présence de tous les membres de la famille.»

Fidèle à sa promesse, son ami, le professeur Talla, un habitué du couple Seck, fait les premières présentations. Sûr d’avoir trouvé sa «Signare» et soucieux d’avoir l’appréciation de son pote de toujours, Ousmane Masseck Ndiaye (l’unique fille de Macky porte le nom d’une de ses épouses, Khatoum Deviche), il se rend pour la deuxième fois chez sa future dulcinée, escorté de ses deux amis (Masseck et Racine) pour déclarer sa flamme à Marième. «Nous étions tous installés au salon et quand Macky a fait part de ses intentions à ma soeur, je me suis moqué d’elle en lui disant que son prétendant était vilain, car il avait la mine tout le temps renfrognée», se marre encore aujourd’hui Adama. Confiant et sûr d’avoir visé dans le mille, Macky ne fera pas une cour assidue à Marième. Ses «têtes de nègre» bien cirées ne fouleront pas fréquemment l’entrée de la demeure des Seck.

«Il savait depuis le début ce qu’il voulait et ne s’en est pas caché », se souvient Oumou Diallo, la maman de Marième. Quelques mois plus tard, on fêtait la korité et Macky s’était envolé pour la France afin de poursuivre ses études à l’institut français du pétrole de Paris mais, le jour de la fête, il m’a appelé pour présenter ses vœux de bonne année et lui faire part de sa volonté de prendre Marième comme épouse. J’ai informé mon époux, le père adoptif de Marième, qui a demandé que ses parents viennent chez nous, à Diourbel, pour qu’on puisse les connaître. »

Amoureux fou, Macky se pliera à la requête de son futur beau-père. Ses parents se rendront à Diourbel pour les présentations et afin de rencontrer leur future bru. «Quelques jours après, ses oncles et son ami, Ousmane Masseck Ndiaye, sont venus demander la main de ma fille, qui leur a été accordée. Marième venait de terminer son cycle scolaire et avait obtenu son Bac Série F2 (Bac électrotechnique). En ce temps, Macky terminait ses études en France», lâche Oumou Diallo. après l’officialisation de l’union, Marième, en sage fille de bonne famille, restera patiemment au domicile de ses parents à Diourbel, à attendre son époux. Elle goûtera aux plaisirs d’une année sabbatique, avant de rejoindre son mari à Dakar, dès son retour de France. «Nous l’avons menée chez son époux en suivant tous les rituels peulh», chuchote sa mère au journal L’Observateur. Dans la chambre de sa mère, la jeune mariée subira tour à tour toutes les pratiques et tous les rituels, conformément aux us et coutumes peulhs. Ses tantes maternelles lui prodigueront conseils et astuces pour bien s’occuper de son époux. enveloppée d’un «thioup» «Palmaire » et recouverte d’un pagne tissé, elle sera acheminée par son beau-père, son oncle et un ami de son père adoptif, au domicile conjugal, à Dakar.

Macky venait de décrocher son premier poste à la Société des pétroles du Sénégal (Petrosen). «Si mes souvenirs sont bons, Marième et Macky ont d’abord habité à Liberté 4, ensuite ils se sont installés aux quartiers de Derklé puis à Hann-Maristes, avant d’emménager dans leur villa à Fann Résidence», lâche Oumou Diallo, se réajustant de temps à autre sur ce sofa en cuir marron qui orne une partie de son immense salon. Désireuse de poursuivre ses études, la nouvelle mariée s’inscrira à l’Ensut de Dakar (actuelle Ecole supérieure polytechnique), mais elle y fera long feu. «Elle n’a pas terminé son cycle à l’Ensut. Elle a quitté l’institut de formation pour s’occuper entièrement et exclusivement de son mari», renseigne un proche de la famille à l’Observateur. Son amour pour Macky est passé par là.

Aujourd’hui, on colle à Marième Faye Sall, le surnom de Simone Gbagbo, version sénégalaise, qui nomme et dégomme les personnalités qu’elle veut à la place qu’elle désire. Vrai ou faux ? «Macky est un sentimental, lorsque c’est difficile, qu’un dossier est très compliqué, je demande qu’on me transfère les dossiers, mon mari est sentimental et sensible, faut pas lui donner les dossiers lourds », confie-t-elle au journaliste de l’Express. Tout est dit ! Tendrement, avec dureté, c’est selon.

Letemoin 

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